vendredi 13 décembre 2024
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Solal et Delbecq : un piano-voix décomplexé 

À l’invitation du GMEM, les deux artistes ont fait résonner les murs du foyer de l’Opéra de Marseille d’une performance innovante et planante

Les Modulations, sont des concerts organisés par le GMEM le troisième mardi du mois à la Friche Belle de Mai et un dimanche par trimestre au foyer de l’Opéra de Marseille. Ils donnent toute leur place à la création et à la vocalité contemporaine jazz ou électro. Le 8 décembre, ce dernier accueillait le duo Claudia Solal et Benoit Delbecq pour la performance Hopetown, du nom de l’album sorti en 2020. Née à l’automne 2013, la collaboration artistique entre la chanteuse, en constante recherche de territoires mélodiques nouveaux et le pianiste rebelle, atypique aux multiples récompenses fut une évidence. Ils enregistrent des chansons improvisées à partir de textes de Claudia : No Sake Tonight, Inner Otherness, Burning Green, Ultimate Embrace… 

Un piano « préparé »

Ce dimanche-là, ils y associent des textes empruntés à Shakespeare comme le monologue de Hamlet, celui de Prospero dans La Tempête et à Rimbaud avec le poème Ophélie. Ils proposent aussi une interprétation transcendée et perchée de My Funny Valentine. Des petits bijoux d’écriture que Claudia extraie d’un carnet blanc, comme un écrin à merveille et sur lequel Benoit Delbecq module, improvise, pirouette jusqu’à la verticalité totale des doigts ou sur la tranche des mains. À l’instar de John Cage, il joue sur un piano « préparé », dont il altère le son en plaçant entre les cordes différents objets : morceaux de bois, pièces métalliques, gommes… Les tonalités évoluent selon le matériau utilisé et la taille de l’objet. On peut y entendre des instruments de percussion en bois comme des tambours primitifs, des xylophones, des cymbales, des bruits de pas sur des feuilles avant de revenir à des sonorités jazzy plus classiques… Après Delbecq, on ne regardera plus jamais un piano de la même manière.  

Claudia vient poser sa voix sur la partition. Dans ses interprétations mélodiques, avec son timbre sensuel, il y a du Peggy Lee. Mais Claudia ne se contente pas de chanter avec une vaste amplitude : elle chuchote, chuinte, questionne, souffre, s’indigne, halète… Elle siffle, trompette, clarinette et c’est dans ces envolées planantes sans limites qu’on la préfère. Elle accompagne sa voix avec l’énergie produite par les ondulations d’un corps à la fois parfaitement ancré dans la terre et d’une mobilité totale vers le ciel. Ce dimanche, Marseille était vraiment Hopetown.

ANNE-MARIE THOMAZEAU

Le concert s’est déroulé à l’Opéra de Marseille le 8 décembre.

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