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AccueilCinéma« Fotogenico » : Marseille méchamment photogénique !

« Fotogenico » : Marseille méchamment photogénique !

Fotogenico, film de Marcia Romano et Benoît Sabatier à l’esprit rock et baroque, s’attache avec habileté à un underground marseillais traversé d’affects, de musique, de beauté et de drogue

Le film, présenté au Festival de Cannes à l’ACID, affiche dans son esthétique même son petit budget. Aucun plan coûteux, des scènes visiblement tournées au fil des rencontres, pas de décor.  Mais le scénario est puissant, les dialogues subtils, le son formidable, et Marseille s’y révèle un décor incroyable. Si bien que ce petit film a tout d’un grand, et se taille même les honneurs de la presse nationale.

Vu de Marseille, le goût en est différent, sans doute parce qu’il parvient à se faufiler dans les images d’Epinal multiples de la ville et, sans leur tourner le dos, à les mettre en perspective. On suit Raoul (Chistophe Paou) dans la quête des traces de sa fille, morte. Il prend pied dans la ville, s’éblouit face à la mer, au Vieux Port, prend le métro, monte les marches du cours Julien, débarque dans ce quartier régulièrement classé comme un des « quartiers les plus cool du monde » par la presse américaine, continue à voyager dans la ville, du Panier à l’anse de la Fausse Monnaie, aux rayons de vêtements recyclés d’Emmaüs Pointe Rouge. Et les images de beauté, évidente de la rade, rebelle du street-art, côtoient des rues en travaux, des habitats précaires, des terrains vagues vaguement gardés, les détritus qui traînent, au soleil. 

Des sons, des sentiments

Mais Marseille est aussi photogénique à l’oreille, pour une fois loin du hip-hop, grâce à la B.O. très présente de Froid Dub (Stéphane Bodin & François Marché)  : Raoul cherche, et trouve, un disque que sa fille a enregistré avec trois copines. Fotogenico, qui claque, post punk indus au féminin. Car ce sont des filles que rencontre ce père, toutes fermées et revêches, lesbienne ou pas, espagnole ou pas, défoncée, ou pas trop. Ce sont aussi des générations musicales que ce film, conçu avec Benoît Sabatier, critique rock de pointe, confronte : celle d’un père qui s’épate du talent posthume de sa fille, et celle qui accumule le recyclage, le vintage, les vinyles, les maquillages disco et les camarguaises rouges, comme autant de totems d’un refus d’intégration au présent. 

Au cœur de ce qui reste un drame et frôle la tragédie, une belle drôlerie s’installe, traversée par un homme en slip rouge, et un très joli moment de tendresse de Raoul avec Tina, l’ex-amoureuse de sa fille, jouée, boudeuse et profonde, par Angèle Metzger. La violence, aussi, d’un sexagénaire rocker dealer qui se prend pour un poète et détruit, patriarche odieux, celles qui l’approchent. La drogue s’impose, séduisante et cauchemardesque, comme la mort, dont il faudra s’échapper.

AGNES FRESCHEL

Fotogenico, de Marcia Romano et Benoît Sabatier
En salles depuis le 11 décembre

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