Le début et la fin du roman se déroulent le même jour. Entre les deux, dix-sept années sont évoquées, chargées de moments heureux et de douleurs. C’est dans le désordre que Nasim Marashi retrace les épisodes de la vie d’un couple heureux, que le désastre de la guerre entre l’Iran et l’Irak (1980-1988) a peu à peu précipité dans une irrémédiable désespérance.
Le récit est fractionné, présent et souvenirs du passé se succèdent sans transitions, au rythme des événements, des morts et des souvenirs de Naval, mère meurtrie, et de son mari, Rassoul, déboussolé. Aussi un retour dans les pages se fait-il parfois nécessaire pour reconstituer la chronologie et éclairer peu à peu l’enchaînement des événements… Rassoul et leur fils Mahziar arrivent dans une zone de marais pour rejoindre un village uniquement habité par des femmes, qui essaient de survivre au milieu de palmiers calcinés et de bufflones estropiées. Naval y a trouvé refuge, effondrée par la mort de son premier fils de trois ans tombé sous un bombardement à Khorramcharh, et jamais vraiment rétablie malgré la naissance d’autres enfants. Rassoul veut la faire revenir dans leur foyer pour tenter de reconstruire une vie familiale.
« Sortir du cercle de la mort »
Naval avait voulu un autre fils « pour remplacer tous les hommes que la guerre lui avait pris ». Mais à la naissance de Mahziar, elle l’avait repoussé. Perdue, presque folle, elle s’enfuit dans le village des femmes, y trouve un apaisement en veillant à la repousse des palmiers, tandis que Rassoul, aidé de sa mère et de ses sœurs, veille à l’éducation des enfants… Nasim Marashi offre avec ce récit de vies blessées une parabole qui montre comment la politique bouleverse les existences en dressant deux portraits attachants dans un roman bouleversant, très maîtrisé.
CHRIS BOURGUE
La mère des palmiers de Nasim Marashi
Traduit du persan par Julie Devigneau
Zulma - 22 €
Retrouvez nos articles Livres et Littérature ici