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De crimes en génocides

Il est des massacres de masse qui n’ont pas pour but d’éliminer un peuple. Quand les populations civiles sont bombardées, et les prisonniers ennemis exécutés, il y a crime de guerre. Quand les malades et handicapés mentaux sont exterminés, quand les homosexuels sont poursuivi·e·s et exécuté·e·s, quand les femmes sont privées de leurs droits et lapidées, quand des opposants politiques sont systématiquement emprisonnés et exécutés, il y a crime contre l’humanité. 

Mais la volonté d’anéantir un peuple, le génocide, relève d’un ressort différent : il ne s’agit pas d’éliminer les groupes antagonistes de sa propre civilisation mais de désigner l’autre comme son ennemi, souvent perçu comme insidieusement introduit au cœur d’une nation qui se veut pure. Les génocidaires s’attaquent à l’existence même d’un peuple : à sa descendance, sa culture, son influence, sa langue et sa trace. 

Le génocide n’est donc pas le degré supérieur du crime contre l’humanité, il en est une catégorie, qui relève d’une intention spécifique, et peut se combiner à d’autres meurtres de masse : les nazis, en éliminant les handicapés et les homosexuels, voulaient préserver l’excellence supposée des Allemands. Mais en éliminant les Juifs et les Tziganes, c’est leur Empire, leur Reich, qu’ils voulaient épurer des ethnies exogènes. 

Comprendre les mécanismes

Le génocide ne se qualifie pas non plus par le nombre de victimes. Lorsque les Danois stérilisent 200 femmes inuits du Groenland dans les années 1960, lorsque la France organise le déplacement de 2 000 enfants réunionnais dans la Creuse dans les années 1970, lorsque la Russie déporte et russifie 20 000 enfants ukrainiens dans les territoires annexés depuis 2014, leur démarche comporte des caractéristiques génocidaires : sans meurtre direct, mais avec l’idée d’affaiblir un peuple minoritaire. 

Le Camp des Milles expose clairement le mécanisme global qui a déclenché les quatre grands génocides du XXe siècle, celui des Arméniens, ceux des Juifs et des Tziganes par les nazis, et celui des Tutsis au Rwanda. On y retrouve des constantes : la mise à l’écart du droit commun ; la censure de la presse et la désinformation ; l’accusation, fondée ou non, d’avoir commis des actes barbares ;  le déni de l’humanité des victimes. Et les moyens des génocides sont toujours les mêmes : le meurtre collectif, l’emprisonnement dans des conditions de survie intenables, la famine organisée,  le transfert d’enfants et la stérilisation forcée. 

Sortir du silence

Aujourd’hui, il s’agit de poser des mots sur ce qui se passe à Gaza. Il est établi que les autorités israéliennes commettent des actes interdits par la Convention de 1948 qui réprime le crime de génocide. Elles sont soupçonnées de vouloir anéantir le peuple palestinien de Gaza. 50 000 morts sont dénombrés pour le moins, dont 13 000 enfants. Une population entière est parquée, laissée sans soin, sans hôpitaux, systématiquement déplacée, acculée, affamée, bombardée.

À l’heure où l’État français commémore le 110e anniversaire du génocide des Arméniens, toujours non reconnu par la Turquie [Lire ici], à l’heure où la France accueille des artistes palestiniens dont elle ne reconnaît pas l’État, mais qui tous dénoncent le génocide de leur peuple à Gaza, il est plus que temps de lever les faux semblants : les horreurs absolues commises par les terroristes du Hamas le 7-Octobre ne donnent aucun droit au gouvernement israélien d’exterminer des civils dans un territoire qu’ils occupent illégalement depuis près de 60 ans. Et quiconque collabore avec un gouvernement génocidaire et un chef d’État sous mandat d’arrêt de la Cour Pénale Internationale se rend complice, face au droit international et à l’Histoire, des actes en cours. 

Agnès Freschel


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