Tassaouef
Tassaouef est pour le danseur Hazem Chebbi une manière de rendre hommage à ses racines, en s’inspirant de son enfance tunisienne au sein de l’influente famille des Chebbiya. Assis en bord de plateau, le public découvre un univers intime. Éparpillés au sol, des tissus traditionnels, portés par les Chebbiya, que le danseur manie et utilise pour y projeter des images de sa grand-mère en train de préparer la Oula, rituel culinaire que les femmes se transmettent.
Pendant près d’une heure, Chebbi désarticule son corps au rythme de la musique composée et jouée par Jihed Khmiri, multi-instrumentiste tunisien, qui intègre des dialogues en dialecte arabe, et des sonorités traditionnelles remixées à de l’électro et du hip-hop. Des percussions aussi, que les deux artistes jouent en harmonie. Frisant la transe à quelques instants, il donne l’impression d’être possédé, exécutant des contorsions où il se plie en deux, regardant le public le dos en voûte. Un duo impressionnant, sensible, à mi-chemin entre tradition soufie et culture hip-hop.
Prélude
C’est devant un public conquis et débout que s’achève la représentation de Prélude de Kader Attou dans sa nouvelle version. Initialement créée en extérieur, la pièce chorégraphique a récemment fait son entrée sur scène dans une version augmentée de plus d’une heure (contre 35 minutes pour la version extérieure). Attou y met en abîme la création du spectacle, en texte et en corps. Absent de la première version, le chorégraphe apparaît ici en premier. Assis à un bureau, il raconte l’histoire de sa naissance, sa première lutte. Car c’est bien de lutte dont il est question dans Prélude, notamment à travers le motif récurrent de la boxe dans la chorégraphie.
Les moments parlés et autofictionnels comme celui-ci ponctuent le spectacle, tantôt avec lyrisme, tantôt avec humour. Mais si la dimension théâtrale est bien présente, elle n’éclipse pas la tradition hip-hop, présente notamment lors de plusieurs cypher, ces cercles au milieu desquels un breaker danse. Cette construction permet à chacun·e de faire valoir sa singularité, que l’on retrouve dans les ensembles et les duos. Et même au-delà de la danse, comme lors d’un magnifique passage rappé par l’un des dix danseurs, où danse un autre sous des lumières stroboscopiques.
Au fur et à mesure du spectacle, le regard du spectateur est appelé aux quatre coins du plateau, et en fond de scène où une seconde partition apparaît parfois en jeux d’ombres. La demi-heure originelle, dansée sur un puissant morceau de Romain Dubois, vient conclure le spectacle. Un bouquet final d’une intensité saisissante.
LILLI BERTON-FOUCHET ET CHLOÉ MACAIRE
La Society a eu lieu du 17 au 19 avril, au Makeda et à La Friche La Belle de Mai, Marseille.
À venir
Prélude
Du 5 au 13 juillet
La Scala, Off d’Avignon
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