L’engagement écologique peut il être porté par la Fondation EDF ? L’exposition a pour ambition de rendre l’art au service de l’écologie, en particulier en concevant des œuvres à partir de matériaux biosourcés ou réutilisés. Coproduite par la Friche Belle de Mai, l’exposition Âmes Vertes, quand l’art affronte l’anthropocène s’étend sur les 1400 m2 des deux plateaux la Friche. Face aux défis écologiques, Paul Ardenne, le commissaire principal, a réuni 22 artistes et 5 architectes français et internationaux pour composer l’exposition, qu’il a conçue comme un « antidote à la culture de la performance » ou une initiation à l’écologie culturelle. Pour sortir de l’anthropocène, et ne plus penser l’espèce humaine comme le centre de la vie.
Décroitre, hybrider ou « solutionner » ?
Les artistes sélectionnés sont ainsi des « chasseurs-cueilleurs » ou, à l’opposé, des « technosolutionnistes ». Des dénonciateurs révoltés ou d’accommodants raccommodeurs. Par exemple Jérémie Gobé et son projet corailartefact quipropose de reproduire des coraux pour restaurer les récifs endommagés : il utilise des matériaux 100 % biosourcés (béton décarboné) et bioassimilables, fabriqués en circuit court.
D’autres solutionnistes, en particulier les architectes, proposent des constructions économes en énergies, voire autonomes. Mais peut-on dire comme Paul Ardenne qu’ils « répondent avec optimisme et résilience » aux « discours éco-anxieux » ? Ou comme Alexandre Perra, le délégué général de la Fondation EDF, qu’ils « luttent contre la dépression verte et le sentiment de l’échec irréversible » ?

L’art est un combat
Les photos puissantes d’Alexa Brunet, Dystopia, qui mettent en scène cordes de pendus sous les arbres, ou humains roses en chair à cochon, ne sont pas résilientes, mais combattives. Comme la peau de vache de Stéphanie Sagot et Suzanne Husky Géoingénierie verte, qui se moque puissamment des technosolutions aberrantes qui consisteraient à envoyer des miroirs dans l’espace ou du fer dans les océans.
Les artistes imposent leurs matériaux crus, leurs rêves hybrides, leurs imaginaires, les réseaux d’eau pure réveillés par une Alliance avec le peuple castor (Suzanne Husky). Espérons qu’à les entendre, nos dépressions vertes ne s’éteignent pas, mais allument nos révoltes contre ceux qui continuent de détruire le monde.
LILLI BERTON FOUCHET ET AGNÈS FRESCHEL
Âmes Vertes, quand l’art affronte l’anthropocène est exposé jusqu’au 1er juin 2025 à la Friche La Belle de Mai, à Marseille.
Sculpter la nature
Dans le cadre de l’exposition Âmes Vertes, Lucy et Jorge Orta proposent avec Symphony for Absent Wildlife une impressionnante installation constituée de 14 sculptures de musicien·nes hybrides portant des costumes de feutre issus de couvertures militaires et de magnifiques masques évoquant des têtes d’animaux. Leurs mains, réalisées en céramique, tiennent délicatement des appeaux en bois. L’installation à été créée à la suite d’une performance, dont une vidéo rend également compte. Le cortège de musicien·nes imite les bruits de la forêt et les chants des oiseaux en soufflant dans leurs appeaux. Iels symbolisent les esprits de la vie sauvage disparue. Des inscriptions relatives à d’anciens guerriers et vagabonds sont brodées au fil jaune sur les masques et costumes. L’installation d’une grande qualité plastique et symbolique, affirme d’un même geste sa gravité et sa poésie.
NEMO TURBANT
Retrouvez nos articles Arts Visuels et Société ici