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Générations hip-hop

Pendant quatre jours, les cultures hip-hop ont réaffirmé leur ancrage et leur diversité dans la population marseillaise

Comment a-t-on pu détourner le regard d’un tel bouillonnement ? À Marseille, le hip-hop a tissé sa toile, pendant près de quatre décennies, sans la moindre reconnaissance institutionnelle. Résultat : la deuxième ville de France, berceau du rap français, regorge de collectifs, véritables viviers de passionné·e·s, de vocations, d’artistes en devenir.

Plateau Créscène 13, HHNS 2022 © Dogan Boztas, Urban prod

Il n’y avait qu’à ouvrir les yeux, tendre les oreilles, pendant ces quatre jours de temps forts du dispositif Hip-Hop Non Stop (HHNS), pour mesurer l’emprise d’une culture sur la cité. La cité et non plus les cités. Car la première des leçons à retenir de la deuxième édition de l’événement initié par les mairies de secteur de Marseille est qu’ici le hip-hop est partout. La fracture entretenue par les responsables politiques de l’ancien temps entre le Nord et le Sud n’existe pas quand il s’agit de graff, de beat box, de breakdance. Même les Jeux Olympiques l’ont compris (Le Comité international olympique a inscrit le breakdance parmi les sports au programme des Jeux de Paris 2024).
À flow tendu

Battle Original Rockerz, HHNS 2022 © Dogan Bostas, Urban prod

Il n’y avait qu’à écouter les participants à l’« open mic » organisé le dimanche 28 août, jour de clôture de HHNS 2022, sous le parrainage de Pone (ex-Fonky Family). Il faut voir avec quelle assurance, quel bagou, pardon quelle tchatche, ces garçons et cette fille habitent la petite scène posée sur l’emblématique Plaine, – avec enceintes et projecteurs à énergie solaire s’il vous plaît – devant public et jurés qu’ils et elle regardent droit dans les yeux. Les jeunes ne lisent plus ? Ne savent plus s’exprimer ? En tous les cas, les jeunes écrivent et scandent leur droit à la ville, à la vie et à la lumière ! Plus tard dans la journée, d’autres clichés vont tomber. Notamment grâce à l’association Baham Arts et l’after de son festival Umoja à la ligne afroqueer.

Un dimanche à la Plaine, HHNS 2022 © Dogan Boztas, Urban prod

Parce que rien n’est trop beau pour la grande communauté hip-hop et qu’elle a aussi le droit de fouler les plus belles scènes de la ville, l’écrin du Théâtre Silvain lui sera ouvert lors de deux soirées précédentes. Le jeudi 25 août, les actrices et acteurs du territoire sont mis à l’honneur. Les démonstrations de talent s’enchaînent à flux (flow ?) tendu. De la prestation toujours impressionnante de human beat box proposée par l’association 2 Da Streetz que pilote la double vice-championne de France Tressym’ beatbox à la rafraîchissante restitution de la résidence des élèves de l’école de danse Cré Scène 13, préparée en quelques jours.
Textes féministes

Sise Ici, HHNS 2022 © Dogan Boztas, Urban prod

À chaque fois, le même engagement, le même enthousiasme, la même application et aussi la même fierté à présenter sa pratique artistique à un public qui sort des cercles d’avertis. On reste plus dubitatif devant la sélection de trois rappeurs masculins accompagnés par Le Makeda, Cookie, Lennox et Morféus, aux codes parfois anachroniques quand, quelques minutes plus tôt, la chanteuse Sise Ici expose la pertinence de ses textes féministes et les nuances de son interprétation. Le battle organisé par les Original Rockerz réunit la fine fleur des danseurs (malheureusement aucune femme parmi les concurrents) du Sud. Un show chorégraphique époustouflant guidé par l’émulation, le fairplay et la créativité. Moment sans doute le plus poignant de la soirée, la création pluridisciplinaire du collectif Artistes en exil où un slameur guinéen, un danseur brésilien – le talentueux Breno Angelo – et un artiste graffeur irakien communient sur un message de paix et de fraternité. C’est aussi ça le hip-hop.

Onyx, HHNS 2022 © Dogan Boztas, Urban prod

Hip-Hop Non Stop ouvrait sous les meilleurs auspices avec un plateau rap aux noms – une fois n’est pas coutume – prestigieux, le 24 août et toujours au théâtre Silvain. Entre les stars newyorkaises enragées d’Onyx, le Narvalo de Seine-Saint-Denis Swift Guad et les représentant·e·s de la scène marseillaise Lansky Namek et L’Amir’Al ou encore Misa et Ekloz comme entre les sonorités des années 90 de la côte Est et celles, plus bariolées, des villes populaires de l’Hexagone, les quarante ans de hip-hop ont été célébrés sous le signe de la diversité des courants et des époques.

LUDOVIC TOMAS

Le temps fort de Hip-Hop Non Stop 2022 a eu lieu du 24 au 28 août dans divers lieux de Marseille.

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