Le public adore Thierry Malandain et ses ballets élégants, graphiques, tout en subtilité diaphane. Les Saisons n’échappe pas à la règle. Le rideau ouvre sur un décor composéd’une fresque de feuilles noires – elles changeront de couleurs à chaque rotation de scènes –, à moins que ce ne soient de grandes plumes…
Plantes ou animaux, le rapport de l’homme à la nature, au vivant, à l’avenir de la planète, ce sont les sujets de prédilection du chorégraphe. Il en a fait le thème de ses précédents ballets : La Pastorale, Sinfonia, Le Sacre du printemps. C’est le cas encore avec Les Saisons, représentation à la fois inquiète d’un monde en décrépitude et lumineuse d’un avenir meilleur possible.
Le ballet est construit autour de trois ambiances qui s’entremêlent tout au long du spectacle. La première déploie dans des rondes endiablées la troupe des danseurs du Malandain Ballet Biarritz qui comme des elfes gracieux en costumes noirs, semblent annoncés le désastre à venir. Elle laisse régulièrement place à une seconde vision ; celle de tableaux baroques aux arabesques dorées dans lesquels deux couples évoluent en quadrille dans de magnifiques costumes de lumières, rouge flamboyant, bleus diamants ou violet profond. L’alternance des saisons ? Probablement.
Les saisons passent
À intervalles réguliers, une troisième série s’entrelace et dévoile des personnages en justaucorps de couleur chair. Ils ont l’allure de spectres nus, souffreteux. Un danseur d’abord puis, plus tard, deux, puis trois, puis quatre… On y entrevoit la disparition des saisons ou leur lente agonie. On reconnait dans le premier solo de l’homme nu les notes de l’Hiver d’Antonio Vivaldi. Car c’est sur Les quatre saisons du compositeur que le chorégraphe a construit ce ballet qui mêle avec bonheur fluidité de l’ensemble contemporain et postures toute en verticalité des menuets de danse baroque.
Malandain est aussi allé puiser dans une partition peu connue du grand public : Les quatre saisons de l’année de Giovanni Antonio Guido. Publiées à Versailles autour de 1726, elles pourraient avoir été écrites vers 1716 pour le vernissage de quatre tableaux peints en ovales par Jean-Antoine Watteau. Les mouvements des danseurs font corps avec ces œuvres musicales qui font la part belle aux violons qui allègrement ou avec désespérance déroulent le temps qui passe.
ANNE-MARIE THOMAZEAU
Spectacle donné les 11 et 12 mars au Grand théâtre de Provence, Aix-en-Provence.
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