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« Grand tour », le merveilleux voyage de Miguel Gomes

Prix de la mise en scène au dernier Festival de Cannes, Grand Tour, le sixième long métrage du réalisateur portugais Miguel Gome,s embarque son monde dans une Asie poétique

Le « Grand Tour » était un voyage qu’entreprenaient les européens aisés, en Europe depuis le Moyen Âge, puis d’une capitale de l’Empire britannique en Inde jusqu’à l’Extrême-Orient. Un voyage qui a inspiré de nombreux écrivains dont Sommerset Maugham. Et c’est en lisant A Gentleman in the Parlour que Miguel Gomes a l’idée de faire son Grand Tour.Un périple qu’il commence en 2020 avec son équipe, filmant en 16mm, pour recueillir une « archive de voyage » qu’il compte utiliser dans le film. Le voyage interrompu par la Covid, une équipe chinoise va finalement parcourir les 3500 km restant pour compléter le périple commencé deux ans plus tôt. Le reste du film sera tourné avec des acteurs, en studio, trente décors sans aucun trucage numérique ! Une prouesse.

L’histoire se passe en 1918 : Edward Abott (Gonçalo Waddington) fonctionnaire de l’Empire britannique, basé à Rangoun, en Birmanie, fuit Molly Singleton (Crista Alfaiate), sa fiancée depuis 7 ans, au moment où elle arrive pour leur mariage. Il ne se souvient plus de son visage et a envie de disparaitre. Et c’est dans ce grand tour que le spectateur est embarqué, guidé par une voix off qui parle la langue du pays traversé. En bateau, en trains, dont un qui déraille, à pied à travers jungle et forêts, en tuk-tuk, en bus, en jonque, et même dans un navire de guerre américain.

Sur la route encore

De Rangoun à Singapour où on assiste à un spectacle de marionnettes et d’ombres, puis à Bangkok où Edward est invité à l’anniversaire du Prince, au son du Beau Danube bleu qui nous emmène au cœur de Saïgon  au milieu d’un superbe ballet de motos chevauchées par des gens, masques anti-covid sur le visage. Rencontres insolites au Japon, comme les musiciens de rue mendiants, les moines Komusos  ou à Manille, un homme aviné qui chante faux My Way de Sinatra. Car dans ce voyage, présent et passé, documentaire et fiction, réel et imaginaire, se mélangent harmonieusement dans un superbe noir et blanc, déjà apprécié dans Tabou (2012) ),-  qui fait penser parfois à l’esthétique des films muets en particulier quelques plans à l’iris. Un noir et blanc, entrecoupé de séquences en couleurs dont ces plans récurrents  de manège « grand tour »  activés par des acrobates birmans.

Si la première partie du film est consacrée à celui qui fuit, la seconde nous raconte le trajet de celle qui le poursuit, la belle Molly : « Je vais lui mettre le grappin dessus, je vais le débusquer que ça lui plaise ou non », dit-elle en pouffant. Elle aussi fait des rencontres qui lui font oublier, un moment, son fuyant fiancé. Des gens étonnants comme Lady Dragon et  Ngoc, l’employée de M. Sanders qui la courtise en vain, lui faisant écouter By the light of the silvery moon. Une deuxième partie plus mélancolique. La fin d’un voyage, comme un écho  aux paroles du consul anglais de Bandung, retiré à la campagne « La fin de l’Empire  est inévitable. Question d’années peut être de mois…On partira d’ici sans avoir rien compris… »

  On ne peut qu’être embarqué dans ce Grand Tour : un récit de voyages, poétique, superbement filmé, qui nous fait rêver mais aussi réfléchir sur le monde et la lâcheté de (certains) hommes.

ANNIE GAVA

Grand Tour, de Miguel Gomes
En salles le 27 novembre

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