Thierry Froger nous entraîne à la suite de deux personnages, la cinquantaine, célibataires, un peu paumés, chacun à la recherche de films oubliés ou perdus, « conjonction hasardeuse de deux solitudes ». Février 2022, Florent Talva fête son arrivée sur Belle-Île par une belle cuite en compagnie des matelots du coin. Le lendemain, il rencontre Rose au restaurant de l’hôtel. C’est le début d’« une relation menée en pointillé » pour le plus grand bonheur des lectrices et lecteurs tant le récit se déroule avec humour et surprises dans une langue inventive.
Talva confie à Rose qu’il avait mis de côté ses ambitions cinématographiques pour se lancer dans le métier de détective privé spécialisé dans les enquêtes liées au cinéma. Il est chargé de retrouver les bobines disparues d’un film dont Carné avait abandonné le tournage, sur un scénario de Prévert avec Arletty. Il entraîne Rose dans sa recherche et ils vont visiter l’ancienne maison d’Arletty, à la recherche d’indices.
Des images fantômes

De piste en piste, d’île en île, une relation complice se dessine et les deux solitaires se retrouvent sur l’île d’Hoedic en avril, sur les traces de Jean Epstein venu y tourner des films dans les années 1930, sujet sur lequel travaille Rose qui voudrait en projeter les images sur de la fumée de goémons, mais le ramassage de goémons ne se pratique plus…
La rencontre d’une brocanteuse, ancienne star de porno, met Rose sur la piste de deux bobines du film de Carné. Autour de ces images perdues se crée une valse-hésitation sur fond d’enquête hasardeuse et de rencontres de personnages loufoques. Le talent de Thierry Froger réside dans le mélange qu’il peaufine entre des faits réels de l’histoire du cinéma et de ses personnages qui semblent sortis d’un film des années 1950 ou d’un roman d’Agatha Christie. On s’étonne, on s’amuse.
CHRIS BOURGUE
Rose à la mer de Thierry Froger
Actes Sud - 21 €
Paru en avril