L’édition théâtrale est, comme l’édition poétique, à l’abri des appétits féroces d’Hachette et Editis. Indépendante, inventive, elle cultive ses niches et fait bon usage de l’argent public nécessaire à son existence. Le Centre national des écritures du spectacle (CNES) est ainsi l’exemple d’un lieu où la parole théâtrale se lit dans les textes imprimés par des éditeurs passionnés, qui soutiennent des auteurs et des traducteurs rarement sous le feu des prix et salons littéraires. Ils sont également peu mis à l’honneur dans les théâtres, qui depuis 50 ans font davantage de place aux metteurs en scène comme « auteur », même si cela, en particulier grâce au CNES, change doucement, et que des auteurices de textes sont aujourd’hui accueilli·e·s en résidence.
Le Festival de l’édition théâtrale revêt donc une importance particulière, fondée sur l’idée que le théâtre s’écrit et que les auteurs dramatiques travaillent la matière textuelle, le dialogue et le reste, différemment des auteurs romanesques. Cet art-là, précieux, se goûte aussi à la lecture, silencieuse ou publique, en déployant l’imaginaire des possibles scéniques.
Rencontres et lectures
Les maisons d’édition théâtrale seront au cœur des Rencontres : François Berreur, qui dirige Les Solitaires Intempestifs, évoquera son auteur phare, Jean-Luc Lagarce, dont il fait découvrir l’œuvre immense. Émile Lansman (Éditions Lansman), recevra Céline Delbecq et Pierre Banos, des Éditions Théâtrales, recevra Sandrine Roche, autrice prolifique de pièces pour adultes, et enfants. Il sera aussi question de la revue d’auteurs La Récolte 2024, dont le sixième numéro édite de courts textes ou extraits de huit auteurs : six d’entre eux seront présents, pour une rencontre modérée par Marianne Clévy (directrice du CNES) durant laquelle de larges extraits seront lus par les comédiens du Conservatoire d’Avignon.
Une rencontre autour d’Armand Gatti, à l’occasion du centenaire de sa naissance, sera aussi l’occasion de souligner l’importance politique de son œuvre sur la Résistance (Bas relief sur les décapités) et d’entendre son poème Les Personnages de théâtre meurent dans la rue.
Le Gral et les auteurices proposeront également des lectures théâtralisées : Noces de Lagarce, Tatrïz (broderie en arabe) de Valentine Sergo (Ed. Lansman), qui tisse les fils de trois histoires ; Lettres en or de Claudia Shiwa, recueil de larmes autour du génocide Tutsi, sera lu et complété d’autres textes sur le Rwanda par Dominique Celis et Natacha Muziramakenga.
Enfin, comme chaque année depuis 10 ans, la SACD organise la rencontre des Intrépides, six autrices qui échangent sur leurs écrits, et sur le rapport de leurs œuvres et leurs vies, et en font spectacle.
Jeunesse et grand prix !
Une commande a été lancée conjointement par Le Totem, scène conventionnée jeunesse d’Avignon, le CNES et les Tréteaux de France d’un monologue pour jeune public d’une quarantaine de minutes. Les textes en création de Simon Grangeat, Kouam Tawa et Lola Molina seront lus par les comédiens du Gral.
Enfin le Prix Grand Cru : depuis février un comité de lecteurs réuni par les bibliothèques du Gard planche sur 12 pièces et six romans… Ils ont attribué le Grand Cru roman à La Colère et l’envie d’Alice Renard, (Éditions Héloïse d’Ormesson) et le Grand Cru théâtre à Par la mer (Quitte à être noyées) d’Anaïs Allais Benbouali (Éditions Koinè). Deux Côtes du Rhône au goût charpenté, et très féminins, qui seront mis en bouches par le Gral.
Agnès Freschel
Les Journées de l’édition théâtrale
Du 5 au 8 décembre
La Chartreuse, Villeneuve-lès-Avignon
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