Elles sont quatre, pétulantes, tout sourire, et ont l’air de sortir d’une photographie en noir et blanc des années 1950 qui aurait été colorisée à l’arrache. Marianne Suner, Sofie Szoniecky, Céline Defay et Sofy Jordan traversent le public nombreux du jardin Labadié ce 15 juillet pour rejoindre la scène d’Avant le soir ! Derrière l’élégance cheap des ensembles robes colorées, escarpins, coiffes, bijoux en toc et grosses fleurs, on devine que chacune peut concourir dans la catégorie « pas la dernière pour la déconnade ».
Ukulélé et accordéon
L’accompagnement se fait au ukulélé et à l’accordéon, de temps en temps rejoints par une flûte traversière, tirée du sac à main, et une petite maraca. Entre les chansons, de courtes prises de paroles-sketches pour introduire la suite, le bonheur étant abordé en plusieurs tranches, accompagnées de mimiques amusées et de chorés dandinantes à la cool. Les quatre sirènes décontractées, se régalant régulièrement dans des aigus extravagants, entament cette traversée du bonheur par le couple, avec le tendre Il y a ta bouche des Ogres de Barback, et l’obsessionnel J’veux un mec d’Adrienne Pauly. Après un petit inventaire de bonheurs simples, voilà l’hymne plantigrade Il en faut peu pour être heureux. Le bonheur, c’est également possible en mode je m’en foutiste égoïste et décomplexé, exemple avec les ironiques Quand on est riche de R. WAN ou Quand la terre sera mourue de Frédéric Fromet. S’ensuivent l’ivresse du Rhum Pomme de Juliette, la « blasitude » de la La fac de lettres de Jacqueline Taieb. Et pour finir par une question : au fond, qu’est-ce qu’on cherche, dans la vie ? Des bisous réponse signée Philippe Katerine. Enfin, au rappel, enthousiaste, un mot d’ordre, signé Agnès Bihl, partagé avec conviction par les ex-Biceps : Faites l’amour pas la vaisselle !
Merci de l’avoir posée
Le lendemain, direction le square Berty Albrecht pour La piqure du taon – Socrate is back ! un éloge de la philosophie et de son père Socrate par la cie Hangar Palace. Quis’est déjà pliée à l’exercice en 2017 avec Éloge de l’amour présenté dans le Off d’Avignon, à partir du texte d’une conférence marquante du philosophe Alain Badiou. Dans ce nouveau spectacle « philosophique », de nombreuses questions philosophiques sont présentes, notamment celle-ci : à quoi ça sert de se poser des questions ?
Prise de tête
« À rien : boire, manger, dormir ça suffit ! » si l’on en croit Sofia (Christine Gaya) assise dans le public, qui va perturber l’exposé d’Agatha (Caroline Ruiz), conférencière habitée par sa volonté de transmettre la passion philosophique. Sofia va se lever, réclamer du contexte historique (dont elle est spécialiste), reprocher à la conférencière ses écriteaux noirs à l’ancienne, moquer les intellos qui croient tout savoir, chanter Viser la lune d’Amel Bent (« Je n’ai qu’une philosophie, être accepté comme je suis »). Agatha se démène face à Sofia, mais aussi au mistral qui fait envoler ses accessoires et aux cloches de la cathédrale Saint-Victor, qui la réduisent au silence pendant plusieurs minutes ! Elle arrive néanmoins à placer du Socrate : « Tout ce que je sais c’est que je ne sais rien », et « Athènes est comme un cheval paresseux, et moi comme un taon qui essaie de la réveiller ». Et même à interpréter le père de la philosophie qui demande à un général ce qu’est le courage, et à un sophiste ce qu’est la beauté. Une conférence-spectacle qui se termine en mode participatif autour de l’allégorie de la caverne de Platon, et en bonus une question à emporter avec soi : ce serait quoi la caverne aujourd’hui ?
MARC VOIRY
À la Bon’heur a été présenté le 15 juillet au jardin Labadié dans le cadre d’Avant le soir !
La piqûre du taon – Socrate is back ! a été donné le 16 juillet au square Berty Albrecht dans le cadre d’Avant le soir !
Prochaine représentation le 22 juillet au jardin Benedetti