C’est un livre de toute beauté que nous offre Jean-Christophe Maillot ; une Danse en festin généreuse et savoureuse à laquelle il a convié plus de cinquante artistes, danseurs et chorégraphes bien sûr mais aussi plasticiens comme Ernest Pignon-Ernest, romanciers, chefs d’orchestre, compositeurs et comédiens. Préfacé par l’écrivain Jean-Marie Laclavetine, qui fait état du « petit elfe blond fait pour la danse qui bondissait d’un plan à l’autre dans Le Petit poucet», le livre déroule la vie du danseur chorégraphe, fils d’un décorateur de l’Opéra de Tours « monté sur scène avant même de savoir marcher ».
Un saut dans l’inconnu
L’histoire de Jean-Christophe suit celle de la danse classique sur près d’un demi-siècle. On y croise John Neumier, chorégraphe et directeur du ballet de Hambourg qui se souvient de ce jeune homme au « sourire magnétique et captivant », « qui avait soif de créer » et qu’il dirigea dans West Side story (1978) et Matthaüs Passion (1980). Et puis un jour, après un mauvais saut, c’est la blessure. Il a 23 ans. Tout s’arrête… ou plutôt tout commence. Avec un nouveau saut… dans l’inconnu.
Jean-Christophe Maillot se dirige vers la chorégraphie. Et il devient, selon ses mots « faiseur de pas ». Les années 1980-1990 ne sont pas tendres pour ceux qui explorent un répertoire classique académique quand la création est au contemporain, à la déconstruction. Il avoue volontiers que « pour un néophyte, voir un danseur marcher les pieds en canard, le collant pincé entre les fesses, avec une coquille valorisant ses attributs est déroutant ». Mais il aime ce ballet classique, exigeant, fruit d’un travail acharné, ce « sacerdoce ». Il transforme le ballet du Grand théâtre de Tours qu’il dirige en Centre chorégraphique national dont il prend la direction. Puis en 1992, la principauté de Monaco lui propose de diriger les Ballets de Monte-Carlo. Ses créations se tournent vers un univers post-classique, refusant de choisir un camp entre anciens et modernes. De son enfance, Jean Christophe a gardé le goût des contes. Au pays des princesses, Il monte Cendrillon (1999), La Belle, (2001) Shéhérazade (2009), Casse-noisette (2013) et Copell-I-A, les grands classiques comme le Lac des Cygnes et Roméo et Juliette, Faust, ballet dans lequel Bernice Coppieters, étoile emblématique des Ballets de Montecarlo fera ses adieux à la scène en 2015. Il met aussi en danse des récits d’écrivains comme Choré de Jean Rouaud, invite à Monaco des dizaines de chorégraphes, Maurice Béjart, Sidi Larbi Cherkaoui, William Forsythe, Angelin Preljocaj et des musiciens prestigieux. Un livre festin, à partager.
ANNE-MARIE THOMAZEAU
La danse en festin, Jean-Christophe Maillot
Gallimard – 45 €
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