Pour sa sixième édition, October Lab, plateforme de création internationale imaginée par l’Ensemble Télémaque et son directeur musical Raoul Lay, a célébré la mandoline en lui consacrant un programme inédit : quatre concertos originaux, composés pour Vincent Beer-Demander, soliste de la soirée. Après une tournée à Malte et à Bolzano, le public marseillais a pu découvrir ces Concertos du Sud au Pic Télémaque et à la Salle Archipel 49.
La soirée s’ouvrait avec Fighting for Hope, concerto ample et lyrique du compositeur maltais Karl Fiorini, au style « mahlérien » et « bernsteinien » qui évoque le temps qui s’écoule inexorablement. Ici, la mandoline s’intègre à l’orchestre et ne s’affirme vraiment que dans la cadence finale, un mouvement « agitato » virtuose et rock’n’roll, après que le violoncelle a longuement tenu, dans les graves, le rôle principal.
Le ton change avec une partition facétieuse que l’on pourrait baptiser « Pièce pour Vincent » de Luca Macchi, professeur de composition au Conservatoire de Bolzano, présent dans la salle. Dès l’ouverture, le public est plongé dans un chaos joyeux : cris des musiciens qui interpellent le mandoliniste, effets de souffle, percussions malicieuses. L’orchestre mime une bande de garnements indisciplinés, à laquelle VBD répond avec des salves de mandoline. La pièce culmine dans une cadence spectaculaire, où le soliste dialogue avec un orchestre transformé en terrain de jeu sonore. Ça crie, ça clapote, ça grince, stridule dans les aigus… Puissant et d’une vivacité absolue. Deux jeunes musiciens du Conservatoire de Bolzano, Giulia Trabacchi (harpe) et Luca Cassini (percussions), qui ont suivi l’ensemble Télémaque dans leur tournée, apportent fraîcheur et énergie à l’interprétation.
Slapping et trémolos
Puis ce sera Fractures dela compositrice Manuela Kerer, œuvre minimaliste délicate. La pièce débute autour d’une seule note, le si, que chaque instrument « fracture » dans une esthétique ciselée.
La soirée se clôt avec un concerto signé Raoul Lay. Inspiré par ses racines italiennes, il nous transporte sur la place d’un village méditerranéen avec un thème populaire – à tirer les larmes – décliné, pour la mandoline, en variations virtuoses à la Paganini. Le premier mouvement, « Cent’anni », « que tu vives cent ans », – expression italienne pour souhaiter longue vie –, évoque l’enfance, une fête foraine avec ses manèges anciens tournoyant.
Le deuxième, Lacrimae, fait dialoguer violon et mandoline avec une immense sensibilité ; le dernier, enfin, invite à une danse rythmique, une rumba méditerranéenne, entrecoupée d’un long solo du mandoliniste, qui donne immédiatement envie de quitter sa chaise. Entre deux partitions, VBD aime aussi raconter au public toutes les possibilités offertes par son instrument : harmoniques, suraigus, pizzicato, glissandi, tap sur le chevalet, slapping, trémolos ou arpèges… Un disque a été enregistré. Il permettra de revivre ces quatre créations exceptionnelles.
ANNE-MARIE THOMAZEAU
Le concert s’est déroulé le 17 novembre à Archipel 49, Marseille.
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