mercredi 2 octobre 2024
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La scène pour sortir de Babel 

La deuxième semaine de la Biennale des Arts de la Scène en Méditerranée décline ses spectacles, mais aussi ses Rencontres, débats et workshops, dans toute la cité montpelliéraine

« La langue de l’Europe c’est la traduction » affirmait Umberto Eco en bon méditerranéen.  Il aurait aussi pu affirmer qu’elle est la langue de la scène. « Babel » désigne en hébreu le chaos, la perte d’un langage universel qui déclenche la guerre mais les arts, et en particulier ceux de la scène, se construisent précisément dans les écarts, les rapprochements, les dialogues et analogies des différents langages et niveaux de langues, et leurs rapprochements avec les signifiés plus universels de la musique et de la danse. 

Spectacles

Le programme de la deuxième semaine de la Biennale pense ces écarts, ces liens, ces interstices, en invitant des artistes de l’espace méditerranéen et en confrontant leurs univers.  
Milk du palestinien Bashar Murkus qui se joue les 16 et17 novembre au Théâtre des 13 Vents, est d’une actualité hélas saisissante, comme si l’organisateur de la Biennale avait pressenti que la scène tragique de la Méditerranée et du monde se jouerait là, en Palestine, aujourd’hui. Des femmes, des mères, y portent les corps de leurs enfants morts, y déversent des larmes de lait que leurs enfants ne boiront plus, pataugent dans le blanc qui se teinte de sang. Un spectacle d’une beauté sidérante, qui a bouleversé le dernier festival d’Avignon.  

Il sera question de Corps traducteurs pour la sortie de résidence de Carlos Carreras, qui interroge la langue des signes comme un art de la scène (le 11 novembre au Hangar Théâtre), de l’art et la culture comme lien entre les deux rives lors de la conférence de  Giovanna Tanzella le 15 novembre au Centre Rabelais ; Paola Stella Minni et Konstantinos Rizos créent quant à eux un RRRRRight now  (du 13 au 15 novembre au Théâtre de la Vignette) qui explore les conséquences chorégraphiées de la subversion (escroquerie ?) musicale et performative de Johnny Rotten (Sex Pistols) tandis que  Pierre et Patrice Soletti retrouvent les sources de leurs Delta(s), bifurcation des catalognes espagnole et française, mémoire de Franco et de l’exil (Théâtre Jean Vilar le 15 novembre), rencontre de la musique et de la poésie. 

Rencontres

Du 15 au 17 novembre la Biennale se décline aussi en Rencontres qui proposent aux artistes, aux professionnels et aux étudiants un véritable séminaire de travail ouvert au public. Avec un workshop le matin dirigé par la chorégraphe et réalisatrice libanaise Danya Hammoud qui travaille sur la violence du geste, l’artiste tunisienne Aïcha Snoussi qui cherche les traces mémorielles dans les archives ; et la philosophe Marie-Josée Mondzain, observatrice critique des images marchandes qui « confisquent » les mots. 
Ces workshops matinaux seront poursuivis par des discussions dans l’après-midi, en particulier sur la mémoire du Théâtre national palestinien, ou sur les théâtres « illégitimes » et militants en France avec Olivier Neveux, sur le théâtre indépendant catalan avec Adeline Chainais… 
Les rencontres se clôtureront le 18 novembre par une journée de séminaire, dialogues, spectacle et DJ set intitulée Qui vive ! Un appel à la vie et à la vigilance, pour que l’avenir de la scène méditerranéenne s’enrichisse de dialogue, et non de chaos.

 AGNÈS FRESCHEL

Biennale des Arts de la Scène en Méditerranée
Jusqu’au 24 novembre
Rencontres des Arts de la Scène en Méditerranée
Du 15 au 18 novembre
Divers lieux, Montpellier
13vents.fr
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