Zébuline. Selon un sondage Ifop pour La Tribune et Public Sénat paru au début du mois, 68% des Marseillais se disent satisfaits de l’action culturelle de la municipalité. Êtes-vous surpris par ce chiffre ?
Benoît Payan. Non, je ne suis pas surpris. Nous voulons faire en sorte que la culture soit accessible à toutes et tous, que la création et les équipements culturels soient soutenus au mieux. Les Marseillaises et Marseillais sont des amoureux de culture. C’est la politique culturelle qui doit être mieux orientée vers leurs attentes et c’est ce à quoi nous nous employons depuis trois ans. Ce plébiscite montre que nous sommes sur le bon chemin, que les Marseillais nous encouragent à poursuivre dans ce sens, c’est une belle réussite.
À quoi est dû selon vous ce succès ?
Il est d’abord le résultat d’une réflexion profonde sur la visée de la culture. Nous pensons qu’elle doit être accessible à tous, qu’elle doit ouvrir au monde et faire réfléchir aux enjeux de société. À partir de cette conviction, la politique culturelle qui en découle est volontariste et tournée vers les Marseillaises et les Marseillais, pour qu’ils s’approprient de plus en plus et de mieux en mieux l’offre culturelle de la ville. Et ça marche ! Il n’y a jamais eu autant de monde dans nos musées par exemple (680.568 visiteurs en 2022), où la fréquentation est même plus forte aujourd’hui qu’en 2019, avant la crise sanitaire. La vivacité de la scène artistique marseillaise est incroyable, reconnue de tous. Il faut donc générer les conditions qui permettent aux artistes de créer et de présenter leur travail devant un public le plus large et divers possible. C’est pour cela que nous avons entrepris un travail de fond pour structurer et développer un soutien public équilibré, aux équipements, aux festivals, à la création, à l’éducation artistique et culturelle. Ce travail commence à porter ses fruits.
« Il n’y a jamais eu autant de monde dans nos musées »
Qu’aimez-vous particulièrement dans la culture et l’offre culturelle de la ville ? Qu’a-t-elle de particulier ?
Ce qu’elle a de particulier est bien évidemment lié à l’histoire de la ville, à son patrimoine culturel, à la diversité de sa population et de ses sensibilités. À Marseille on peut – et on veut ! – découvrir les œuvres d’une formidable artiste moderne algérienne, écouter en terrasse un groupe de cumbia, s’initier à la céramique provençale et voir Nabucco à l’Opéra… dans la même journée !
Avez-vous encore le temps d’avoir une vie culturelle ? D’aller à l’Opéra, de peindre…?
En tant que Maire, ma priorité c’est Marseille et les Marseillais, j’y consacre tout mon temps et mon énergie, c’est mon engagement et je m’y tiens. Il ne reste donc plus beaucoup de place pour autre chose. Mais dès que mon emploi du temps me le permet, c’est vers la culture que je me tourne. Écouter un opéra, voir une belle exposition, découvrir le travail d’un jeune artiste, croquer un paysage sur un bout de feuille de papier. C’est ma respiration, mon oxygène. Ça me donne de la force pour avancer.
De quelles mesures et projets menés depuis 2020 êtes-vous particulièrement fier ?
Je suis heureux que tous les Marseillais puissent maintenant profiter gratuitement des bibliothèques et des musées municipaux, qu’on puisse proposer une programmation variée et gratuite partout dans la ville dans le cadre de l’Été Marseillais. La gratuité ne fait pas tout, mais elle supprime une barrière inutile et majeure à la fréquentation par toutes et tous des lieux et des manifestations culturels. Et les Marseillais sont plus qu’au rendez-vous, c’est ça ma plus grande fierté !
Et puis je suis très fier de la réouverture du Musée d’Art Contemporain de Marseille. Nous avons mis de l’énergie pour relancer ce chantier qui était quasiment à l’arrêt alors qu’il suscitait beaucoup d’attente, de la part des professionnels mais aussi des Marseillais. L’énorme succès populaire de sa réouverture en témoigne, sa résonance nationale aussi. J’en suis d’autant plus fier que la manière dont nous avons pensé sa réouverture et ses premiers mois d’existence représente l’esprit de notre politique culturelle : créer des espaces et des temps ouverts, attirants, où l’excellence artistique et scientifique est mise en partage, où l’exigence de qualité et l’ouverture à tous ne sont plus mises en contradiction.
« Dès que mon emploi du temps me le permet, c’est vers la culture que je me tourne »
Quels projets auraient mérité d’être mieux développés ? Et quels chantiers restent à mener selon vous, concernant la politique culturelle mais également d’autres missions liées à celle-ci ?
Nous avons avancé sur beaucoup de fronts en trois ans. Rouvrir un musée et deux bibliothèques (celles du Panier et des Cinq-Avenues), lancer la création d’une dixième bibliothèque municipale dans le 3e arrondissement, assurer le soutien d’un secteur culturel fragilisé par la crise sanitaire, renouveler les modes de gestion d’équipements culturels importants, à commencer par nos propres musées, ce n’est pas rien. Ce sont des engagements que nous avions pris et qui ont été tenus. Nous avons aussi passé un cap important sur la question du patrimoine, en proposant le classement de quarante nouveaux édifices, validés par le ministère de la Culture.
Mais il reste bien sûr beaucoup de travail à accomplir. Les Marseillais doivent pouvoir compter sur le service public culturel qu’ils méritent. Nous devons pouvoir assurer un service de lecture publique de qualité, avec des bibliothèques vivantes, ouvertes à des horaires adaptés à la vie des étudiants et des familles, animées par des équipes qui retrouvent du sens à leur travail. C’est la feuille de route de la nouvelle directrice de la Lecture Publique Sophie Geffrotin qui vient de nous rejoindre en juin. La question de la lecture publique est le fondement d’une politique culturelle ambitieuse et inclusive, elle est intrinsèquement liée aux grands chantiers que nous menons sur les écoles et l’éducation. Nous avons également un grand travail de fond à accomplir sur l’Opéra, nous voulons progresser sur qualité de l’accueil dans nos musées et continuer à faire grandir l’Été Marseillais, pour qu’il devienne le grand rendez-vous estival que les Marseillais méritent d’avoir. Mais aussi trouver, en dialogue avec les acteurs du territoire, les voies et moyens pour soutenir et développer la scène artistique et culturelle marseillaise, qui fait face, comme partout, à des enjeux sociaux, économiques et environnementaux inédits. Recoudre Marseille du Nord au Sud, réduire les fractures sociales et les inégalités territoriales, répondre aux défis environnementaux, ce sont aussi des questions qui se posent en matière culturelle. Les chantiers ne manquent pas ! Mais la détermination est là, nous avons la volonté farouche d’être à la hauteur des attentes.
ENTRETIEN RÉALISÉ PAR SUZANNE CANESSA