La vie de Mahin (Lily Farhadpour), veuve et retraitée, n’est pas bien rose : entre insomnies, repas solitaires, jardinage, repas avec ses copines où l’on parle des hommes, où l’on évoque en plaisantant les maladies présentes ou à venir. Les coups de téléphone avec sa fille à l’étranger toujours pressée de raccrocher, occupée avec ses jeunes enfants la laissent sur sa faim. Jusqu’au jour où, encouragée par une amie à se trouver un compagnon, elle décide de se reprendre en main, se maquille, se cherche une tenue plus pimpante et décide d’aller boire un coup dans un hôtel de luxe où, sans maitrise du QR code on ne peut commander ! Mahin s’attarde dans la file d’attente d’une boulangerie, essaie d’engager la conversation avec un jardinier dans un parc où, témoin de l’interpellation par la police des mœurs d’une jeune fille qui ne porte pas convenablement son hijab, elle s’interpose et évite que la deuxième fille ne soit embarquée aussi. C’est dans un petit restaurant pour retraités où elle peut utiliser ses coupons de personne âgé qu’elle voit un homme, seul, en train de déjeuner. Elle le trouve charmant, se renseigne, apprend que c’est Faramarz (Esmail Mehrabi) un chauffeur de taxi, qu’il vit seul. Elle le suit et insiste pour qu’il la reconduise chez elle, avant de l’inviter à passer la soirée avec elle. Après un arrêt dans une pharmacie, la soirée peut commencer : repas, vin, confidences, musique et danses sans oublier un gâteau en préparation et une douche étonnante : devant l’hésitation de Mahin à montrer son corps qui n’est plus celui de ses 20 ans, Faramarz lui propose une douche habillée. Un plan touchant et drôle à la fois. Une soirée que Mahin n’est pas près d’oublier…Et nous non plus. On est touché, on rit, on apprécie les images du directeur de la photo Mohammad Haddadi et la musique d’Hossein Ghoorchian. Et on ne peut que se réjouir de la liberté que s’accorde ce jeune couple étonnant de 70 ans !
Amour censuré
Cette histoire romantique, traitée souvent avec humour, superbement interprétée, est éminemment politique avec cette femme de 70 ans qui ne porte pas de hijab, reçoit un homme chez elle, et n’est évidemment pas du goût du gouvernement iranien. Maryam Moghaddam et Behtash Sanaeeha, les réalisateurs de My Favourite Cake (Keyke mahboobe man) ont été empêchés par les autorités iraniennes de se rendre à la Berlinale où le film était en compétition. Dans un communiqué, le festival précise qu’ils se sont vus « confisqués leurs passeports » et sont « poursuivis par la justice pour leur travail d’artistes et de cinéastes ». Le film « franchit tellement de lignes rouges (sur des choses) qui sont interdites en Iran depuis 45 ans », explique Maryam Moghaddam. « C’est l’histoire d’une femme qui vit sa vie, qui veut avoir une vie normale, ce qui est interdit pour les femmes en Iran. »
ANNIE GAVA
À Berlin
My Favourite Cake, de Maryam Moghaddam et Behtash Sanaeeha
Prochainement en salles