Elles sont trois. Femmes, pauvres, très pauvres, à Palerme. Pour survivre, elles cousent le jour et se prostituent la nuit. Pour survivre, et pour élever cet enfant qui leur est arrivé, fils d’une quatrième sœur de misère, morte sous les coups de son homme. L’enfant, mutique, est leur fils à toutes, mères toutes les trois, liées par un lien plus fort que la sororité.
Le pitch paraît glauque, misérabiliste, noir au possible. Pourtant dès les premières secondes, on est saisi par l’énergie, la force, la générosité de ces femmes du peuple prêtes à tout donner. Victimes des hommes et de la misère sociale, elles ne baissent jamais la tête et sont habitées d’un amour immense, qui les lient entre elles et leur donne une force surnaturelle. Cet amour maternel les transcende, et les rend capables d’une Miséricorde que nul n’exerce envers elles. En italien Mamma sonne comme « m’ama », et la maternité est homophone de l’amour.
Le spectacle est porté par trois comédiennes magnifiques, qui chantent et jouent chacune dans son registre plus ou moins rocailleux. Elles sont accompagnées par un danseur merveilleux, Simone Zambelli, qui incarne l’enfant de tout son corps longiligne et ses yeux tendres.
Comme toujours chez Emma Dante, le rythme est millimétré, les séquences se succèdent dans une gestion de l’émotion parfaite, autour de quelques accessoires, quatre chaises, des jouets qui disent l’enfance et la misère, et comment l’amour permet leur enchantement. L’éclairage, la musique et l’écriture suffisent à franchir les portes du rêve et à dépasser la misère.
AGNÈS FRESCHEL
Misericordia
Spectacle en sicilien surtitré en français
7 juin
Théâtre Liberté, scène nationale de Toulon
chateauvallon-liberte.fr