jeudi 23 janvier 2025
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Une caméra à l’école

Dans son documentaire Château Rouge, Hélène Milano suit les élèves de troisième d’un établissement scolaire de ce quartier populaire parisien

Après Les Roses noires et Les Charbons ardents, c’est un nouveau documentaire sur l’école que propose Hélène Milano avec Château Rouge – du nom du quartier situé au cœur de la Goutte-d ‘Or, dans le XVIIIe arrondissement de Paris. C’est dans un établissement de ce territoire défavorisé, le collège Georges Clemenceau, que la cinéaste a posé son regard et sa caméra. Une caméra bienveillante qui a su saisir la richesse des pensées et des paroles d’élèves. Ils ont 14 ou 15 ans et sont en 3e, la classe charnière, où se joue leur avenir, le moment où il faut faire des choix alors qu’ils ne savent pas encore qui ils sont. Certains ne sentent pas du tout « extraordinaires ». Certains sont décrocheurs, trouvant que l’école ne sert à rien. D’autres ont des problèmes de concentration, de langue. Ce sont des adolescents, un moment où il faut « apprendre à s’aimer avec ses défauts », le moment où on « découvre le monde et où on se découvre soi-même ».  

« Une porte blindée »

Hélène Milano les filme en groupes, en cours de français où l’on lit Jules Vallès, en atelier philo « pour retrouver le plaisir de penser » et où l’on s’interroge sur le mot « grandir ». Elle les suit lors d’entretiens avec les enseignants, la conseillère d’orientation, d’éducation, la psychologue qui, à l’écoute, bienveillants, essaient de remettre sur le bon chemin ceux qui se sont égarés, leur proposant des solutions, des accompagnements. Parmi tous ces élèves, certains deviennent de vrais personnages : Bilel, casquette sur la tête rêve de devenir footballeur. Mamadou, qui prépare un exposé sur Stromae, a toujours des doutes : « Devant moi, j’ai comme un mur, une porte blindée. »

La cinéaste leur donne la parole, face caméra. Et les visages reflètent tour à tour espoirs, regrets, rêves brisés, toute une gamme d’émotions qui prend le spectateur aux tripes. Une autre belle séquence capte la danse de deux jeunes sur la musique de Songs of Maria, Chunga Changa… On connait le goût et le talent de la cinéaste pour les portraits : « Je suis fascinée par la puissance que je peux trouver chez un être quand je le regarde. On a à la fois accès à un paysage, des émotions, mais on ne sait jamais tout. Ce mystère-là, je le trouve très important. » Quand la caméra, en un long travelling silencieux, révèle, en gros plans superbement éclairés, les visages de ces garçons et ces filles qui ont dû renoncer à leurs rêves, on se dit qu’il faudrait vraiment que tout change. Et ce n’est pas l’uniforme qui va faire disparaitre les inégalités et le déterminisme social.

ANNIE GAVA

Château Rouge, de Hélène Milano
En salles le 22 janvier

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