Qu’il s’agisse des œuvres produites par la promotion 2022 en art et design des Beaux-arts de Marseille ou du tandem Prune Phi – Sandra Tun Tun, le résultat est stupéfiant de maturité, d’inventivité et de maitrise technique. À la Salle des machines, le dialogue entre Prune Phi et Sandra Tun Tun, loin d’être aisé tant leurs pratiques diffèrent, met en relief leurs rapprochements : leur questionnement sur leur relation au rituel et à leurs appartenances. L’une à travers des images recomposées, un récit fictif et le détournement de coutumes d’Asie du Sud reçues en héritage ; l’autre par la fabrication d’empreintes sonores, de l’usage de résidus. L’une comme l’autre investiguant les notions de transmission et de fragmentation dans des paysages visuels ou sonores qui se regardent et se répondent pour créer des espaces de rencontre.
Disparité et cohérence
Dans la Tour Panorama, pas moins de trente-sept jeunes artistes ont investi les lieux grâce à Jeanne Mercier,commissaire d’exposition, qui a accompli un véritable miracle : faire de la disparité une proposition cohérente ! À tel point que dans les trois axes explorés – chantier, corps, artefact – chaque œuvre se singularise, trouve sa juste place, entre en résonance. Et ce dès l’entrée du plateau de la Friche habité par des habitacles utopiquesqui ouvrent de nouvelles perspectives en introduisant la notion de « senti et ressenti » sur laquelle est fondée toute la narration. Sur le parcours jonché de propositions plastiques et de créations design présentées volontairement pêle-mêle, la sensation de découverte est quasi permanente. Il y a là un authentique renouveau dans les matières dont ils se réapproprient l’usage (matériaux pauvres, organiques choisis par Renouée Stolon pour « habiter la terre »), les techniques qu’ils maitrisent, souvent relatives au geste artisanal (statuaire en terre fichée à l’envers dans le sable de Livia Vesperine Roure), les traditions qu’ils réinterprètent (textiles, collages). Comme dans les projets futuristes qu’ils imaginent pour les habitants de la mer (la plate-forme d’Elodie Adorson) ou pour lutter contre la pollution (aménagement du parc du 26e centenaire de Marseille de Ke Li).
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
Habitacles Proposition des Beaux-Arts de Marseille Jusqu’au 16 octobre XOXO Proposition de Triangles-Astérides Jusqu’au 6 novembre Friche la Belle de Mai, Marseille lafriche.org