La soirée d’ouverture de Un air de Danse semblait gagnée par l’air commun de l’été : gratuité, buvette et food-truck, paella partagée au Parc Jourdan ont ravi plusieurs centaines de spectateurs, nettement plus locaux que ceux du festival lyrique.
Deux spectacles s’y succédaient, un gratuit, un payant, un local, un international. Et le local et gratuit était d’une vigueur et d’un engagement plus net que celui de Sharon Eyal !
Son « Soul Chain », ballet essoufflant de la compagnie allemande Tanzmain, reste un discours glacé posé sur de l’électro pourtant sur mesure, riche et narrative, d’Ori Lichtik. La « chaîne des âmes » repose sur les unissons parfaites des corps, dont se détache parfois un individu, et qui parfois superpose deux voix, deux groupes de danseurs, presque constamment sur demi-pointes, dans des vêtements couleur chair invisibles qui effacent les différences entre les genres. Virtuose et abstraite, la danse reste froide, répétitive, sans contact entre les corps séparés, même si le public, à Aix comme lors de Montpellier danse, applaudi très longuement l’engagement sans faille de danseurs d’exception.
Cohorte de jeunes danseurs
L’enthousiasme quelques heures avant était plus joyeux et populaire. Avec « Un Sacre, des Printemps » Arthur Perole fait le pari de la jeunesse, de sa force de révolte face aux catastrophes auxquelles elle est confrontée.
Pas question ici de sacrifier une élue pour que le groupe survive, comme les centaines de chorégraphies du Sacre le proposent, suivant l’argument de Stravinski. Pas question non plus de rapport de domination entre femmes et hommes, strictement égaux. Leur force est commune, et leur groupe pourtant cherche peu l’unisson, chaque individu scandant à sa manière la violence orchestrale de Stravinski, ses alanguissements aussi, traversés de samples et de battements électro qui ajoutent leurs emballements frénétiques et leurs nappes sonores sans dénaturer la partition.
Les danseurs ne lâchent rien, confrontés aux agressions, à la transe, au show bizz, à l’impossibilité de vivre leur printemps dans une société qui semble sans avenir. Semblant mordre dans la vie avec une sauvagerie qui n’est jamais menaçante, mais une démonstration de leur appétit de vivre
Ce sacre avait été créé par le Ballet Preljocaj junior en avril, Arthur Perole y étant en résidence durant toute la saison. Ballet junior augmenté, pour cette version, de 9 danseurs de l’Ecole Nationale Supérieure de Marseille : là encore, une alliance inédite, dont il faudra poursuivre l’élan !
AGNES FRESCHEL
L’ouverture de Un Air de danse a eu lieu au Parc Jourdan le 21 juillet
Le festival s'est poursuivi jusqu’au 2 août avec, en particulier, un solo de Ana Perez, deux pièces de Kader Attou, et les Mythologies d’Angelin Preljocaj dans la Cour de L’Archevéché