Étrange choix que ce titre choisi pour la distribution française du film : La vie rêvée de Miss Fran, en écho au rêveries fantasques de Walter Mitty. La comédie très feel good de Ben Stiller ne semble en effet pas compter parmi les influences de Rachel Lambert. Et les rêves dans lesquels la jeune réalisatrice plonge Fran n’ont rien d’idylliques : le titre original, Sometimes I think about dying (parfois, je pense à mourir) en révèle davantage la teneur … La jeune et timorée employée de bureau, campée avec une rare délicatesse par la britannique Daisy Ridley, cache en effet sous ses airs timides et rangés un étonnant goût pour le macabre. S’enchevêtrent ainsi en début de métrage des scènes anodines de bureau, ponctuées d’échanges pour le moins banals entre collègues, de dîners silencieux en solitaires, et d’échappées vers les paysages marins plus sauvages de l’Oregon. S’y déploient toujours, de façon inattendue, les fantasmes morbides de Fran, que le grain de l’image – grâce à la très belle photographie de Dustin Lane – et la musique douce et élégiaque de Dabney Morris rendent étonnamment apaisants. Le fantasme de mort apparaît ainsi non pas comme l’expression d’un désespoir, mais comme un refuge sans doute trop séduisant face à un monde dont Fran peine à appréhender les codes.
L’arrivée de Robert, un nouveau collègue de travail curieux mais plus affables, incarné par l’humoriste Dave Merherje, a tout pour bouleverser le quotidien de Fran, dont les interactions sociales se limitaient jusqu’alors à quelques hochements de tête gênés. Le spectacle de cette éclosion-là, porté par la justesse de la réalisation et l’interprétation très inspirée de Ridley, vaut à lui seul le détour.
SUZANNE CANESSA
La vie rêvée de Miss Fran, Rachel Lambert
En salles le 10 janvier