Les gros patinent bien est un titre en forme de clin d’œil au Théâtre du Rond-Point à Paris, qui fut une patinoire avant d’être transformée en théâtre. C’est Jean-Michel Ribbes, alors directeur de ce théâtre, qui a proposé au duo formé par Pierre Guillois et Olivier Martin-Salvan de participer en septembre 2020 au petit festival en plein air gratuit qu’il organisait, « Le Rond-Point dans le jardin ». Essai transformé en décembre 2021 par la création du spectacle, couronné en mai 2022 par le Molière du Meilleur Spectacle de théâtre public. Depuis, c’est carton plein, des centaines de représentations, sur les scènes des théâtres publics et privés, et c’est loin d’être fini !
Burlesque
On n’est pas loin de Laurel et Hardy : Pierre Guillois en Stan Laurel, grand échalas muet s’agitant dans tous les sens pour répondre à temps aux injonctions du déroulement du spectacle, et à la mécanique du burlesque. Olivier Martin-Salvan en Olivier Hardy, rondelet, braillard et hautain, statique, assis tout du long sur un trône dérisoire, tabouret sommaire dessiné au feutre sur un cube de carton. Dispositif depuis lequel ils vont partager avec le public une odyssée déjantée et poétique. Ce qui est déjanté, c’est le récit : road-movie délirant, à la poursuite d’une sirène amoureuse, partant de Norvège jusqu’à l’Espagne, en patins à glace, avion, bateau, trottinette, vélo, baudet. Ce qui est « poétique », et bluffant, c’est la capacité à produire cette « épopée » avec de simples mots écrits au feutre sur des bouts de carton. Certes, on peut en écrire et en faire des choses sur et avec le carton : découpages de tout acabit, volumes de tous formats. Mais à ce point -là ! Signalons que l’équipe comprend une ingénieure carton : Charlotte Rodière. Pierre Guillois excelle en gestuelles, chorégraphies, et mimiques tordantes pour planter les différents décors, du haut du ciel jusqu’au fond de l’océan, représenter la multitude de créatures qui lui sont assignées (sirène, marmotte, tour de contrôle, Helmut, macareux, chamois, …). Quant à Olivier Martin-Salvan, il se déchaine, depuis son trône-tabouret et son gromelot d’anglais vaguement shakespearien, petit roi autocentré à l’arrogance infecte, devant faire face tant bien que mal à des situations délirantes qui le dépassent. Alors rendons-nous à l’évidence : se faire embarquer de la sorte dans leurs délires, alors qu’on était prévenu : chapeau !
M.V.
24 et 25 avril
Théâtre Molière, scène nationale archipel de Thau, Sète
26 et 27 avril
Scène de Bayssan, Béziers