Zébuline. Il y a deux ans, vous initiiez avec la complicité du maire de Vauvenargues, Philippe Charrin, un festival qui scellait l’amitié entre le village qui avait accueilli votre famille exilée de Syrie. Aujourd’hui, sur quel mode se prolonge-t-il ?
Bilal Alnemr. Certes, on ne peut poursuivre cette manifestation sur le mode des remerciements. Désormais, il s’agit de souligner les liens d’amitié entre mes deux pays, celui de ma naissance et celui dans lequel je vis. À ce propos, il y a une belle histoire : en 1929, était mandatée une mission archéologique française dirigée par Claude Schaeffer en Syrie. Elle y découvrit les vestiges de l’antique Ougarit. Parmi les découvertes, il y avait des tablettes d’argile couvertes de signes cunéiformes. Des notations musicales, les premières connues au monde accompagnaient certaines lettres… plus de 36 chansons composées vers 1400 av. J.-C. Elles sont conservées en France… Ce lien m’est apparu lumineux ! La relation entre nos deux pays était évidente et un échange culturel entre les deux civilisations, nécessaire. C’est pourquoi le festival investira aussi d’autres lieux que ceux disponibles à Vauvenargues, mais se déploiera au musée Granet, pour une soirée exceptionnelle avec Marie Sans à la guitare baroque, Maciej Kulakowski au violoncelle, Jonathan Ware au piano et moi au violon, confrontant Marin Marais et notre contemporain Philippe Hersant dans ses Variations sur la « Sonnerie de Sainte Geneviève du Mont » de Marin Marais.
Une programmation dense sur trois jours !
Oui ! Et qui fait se rencontrer les musiques classiques d’Occident et d’Orient. On peut y déceler des influences réciproques, des esprits qui abordent sur des modes divers les mêmes émotions, les mêmes élans et avec des musiciens de premier plan, représentatifs des deux cultures, je suis particulièrement heureux d’avoir pu inviter de nouveau Waed Bouhassoun mais aussi de faire se rencontrer des œuvres de Ligeti avec l’hommage que leur rend le professeur que j’ai eu en Syrie. La programmation se définit entre les œuvres de Beethoven et les chants bercés des accents du oud, de Debussy ou Poulenc et Albeniz…
ENTRETIEN RÉALISÉ PAR MARYVONNE COLOMBANI
Festival de Vauvenargues
Du 21 au 23 juin
Divers lieux, Vauvenargues
Musée Granet, Aix-en-Provence