Les mouvements de danse amples d’un premier artiste guident les spectateurs à l’entrée de l’église des Célestins. Dans l’enceinte du monument, ils découvrent des performances simultanées et déambulent à travers les espaces délimités par des cloisons ou ouverts, au contact immédiat des artistes. Imaginé par Mathilde Monnier accompagnée du cinéaste Patric Chiha, du dramaturge Pascal Bouquet et de l’autrice et chorégraphe Cristina Morales, le projet Transmission impossible permet à cinquante jeunes artistes nationaux ou internationaux de réfléchir à leurs pratiques. Au Festival, ils expérimentent de nouvelles formes de travail, restituées lors de sessions ouvertes au public.
Représentation dépaysante
Comme dans un musée, les vingt-cinq participants de la première semaine du projet, s’exposent et investissent les lieux, grimpent sur les colonnes en pierres ou se tiennent debout sous les fenêtres. Mais le musée est vivant et à mesure que les spectateurs progressent dans leur visite, les artistes, œuvres organiques et mouvantes, se déplacent et changent de pratiques. L’attention du public est mise à l’épreuve : un groupe de plusieurs femmes marchent en rythme pendant que deux autres artistes, trempés, sont juchés sur une fenêtre et regardent fixement. Les performances sont simultanées, impossible de tout voir, de tout entendre. Ce n’est plus aux artistes de venir aux spectateurs, mais à ces derniers de chercher l’événement, tout en prenant part à la représentation par leurs interventions orales (répondre à des questions absurdes) ou physiques (effacer à l’éponge des mots à la craie).
À qui transmettre ?
Mathilde Monnier explique dans sa note d’intention vouloir que le savoir circule entre artistes au hasard des rencontres du Festival. Ce dernier est la matière d’expérimentation des participants, qui assistent à des spectacles, font cheminer leurs réflexions et ouvrent des espaces d’invention continus. La représentation est en élaboration perpétuelle : les textes sont écrits en direct sur un ordinateur, un montage vidéo est en cours, des questions sont semées çà et là comme « Ce tabouret peut-il être libre ? ». Les participants laissent à disposition leurs carnets d’étude emplis de notes et schémas griffonnés à la sortie du spectacle pour montrer leur processus créatif. Néanmoins une question demeure : la transmission des arts vivants n’est-elle destinée qu’aux artistes ? Qu’en est-il du public dont le regard est constitutif du spectacle et qui a donc la responsabilité d’y porter attention ?
CONSTANCE STREBELLE
Transmission impossible
Jusqu’au 20 juillet, Église des Célestins, Avignon