Entre les festivals de musique classique, d’électro ou de jazz, les rendez-vous consacrés au blues se font bien rares dans la région, ou en France. C’est pourtant la bonne idée que porte la Ville de Meyreuil depuis 2019, au sein du sublime domaine de Valbrillant, face à la Sainte Victoire. Et ce n’est peut-être pas un hasard qu’un tel rendez-vous soit né ici, car comme le rappelle Jean-Pascal Gournes, le maire de la ville, Meyreuil est « une terre d’hommes venus de l’Europe entière pour extraire pendant un siècle le charbon de la terre de Provence ». Des « gueules noires » face à d’autres gueules noires, celles des esclaves et des forçats afro-américains, qui, dans l’ignominie de leur condition, ont su donner naissance aux plus touchantes notes qui soient : celles du blues, qui donnera ensuite – et entre autre – la soul et le rock.
En six éditions, le Blues Roots Festival a su accueillir quelques-uns des artistes qui portent de la plus belle des manières cet héritage : Taj Mahal en 2019, Rhoda Scott en 2020 ou Sugaray Rayford en 2023. Bonne nouvelle, le cru 2024, qui se tient du 12 au 14 septembre, est sur la même lancée : du blues toujours, qui explore les différents courants du genre, porté par des artistes – hommes et femmes – du monde entier.
Sur scène
Dès l’ouverture, le Blues Roots attaque fort, avec la venue de Joe Louis Walker, une des dernières grandes stars du genre. Ce Californien, aujourd’hui âgé de 74 ans, s’est fait connaître sur le tard, à la fin des années 1980. Une carrière qui a été marquée par des hauts et des bas, son blues mâtiné de rock et de soul n’était pas forcément au goût des puristes. Qu’à cela ne tienne, il intègre le Blues Hall of Fame en 2013, ce qui aurait pu être la reconnaissance ultime de son travail s’il n’avait pas été surnommé « The Bluesman » par la Queen des Queens : Aretha Franklin. Le même soir, le plateau accueille la Brésilienne Nanda Moura. Chanteuse et guitariste, elle revisite les grands classiques du blues des années 1920, 30 et 40. L’occasion d’entendre, à coup sûr, quelques notes de la légende absolue du genre : Robert Johnson et son Sweet Home Chicago.
De Chicago on passe à Detroit le lendemain avec Thornetta Davis. Chanteuse, star en Amérique et dans sa ville, elle a notamment assuré les premières parties de Bonnie Raitt, Gladys Knight ou Etta James en début de carrière. À ses côtés on va découvrir Stephen Hull : artiste autodidacte, il s’est mis à jouer du blues sur sa guitare à 14 ans. Bien lui en a pris puisqu’il s’est fait repérer par Bruce Iglauer, le patron du très réputé label Alligator. Depuis, il court les grandes scènes du monde, on l’a vu à Montreux cet été, et joue une musique dans la lignée des Albert King, BB King et Elmore James.
Le samedi, s’ouvre dès 14 heures une jam session dans la salle Jean Monnet, avec sur scène, Marc Campo, Lionel Dandine, Christophe et Philippe Le Van. Ensemble, ils proposent une répétition expliquée et commentée aux spectateurs, avant d’assurer un concert dans un second temps. Un tour de chauffe bienvenu avec le grand final qui accueille l’ingénieux danois Mike Andersen et l’Américain Lance Lopez, qui n’est pas sans rappeler un autre grand nom du blues, Stevie Ray Vaughan.
NICOLAS SANTUCCI
Blues Roots Festival
Du 12 au 14 septembre
Domaine de Valbrillant, Meyreuil