Ramona, employée dans une société de nettoyage, voit son quotidien bouleversé lorsque son patron annonce à tous les agents qu’à la suite d’un changement de direction, les salaires vont être revus à la baisse. Elle a 42 ans, huit ans d’ancienneté, et quitte son poste, révoltée. Certes il lui reste les quelques heures qu’elle fait sur le port, relevant les filets ou remplissant des sacs de moules. Pas assez pour survivre. Elle se met à la recherche d’un nouvel emploi. La caméra, nerveuse, la suit, d’agence en bureau : sa colère grandit, ses propos deviennent de plus en plus agressifs. Il y a de quoi ! Sa vie est dure entre un mari qui boit, la brutalise parfois, la trompe. Quant à sa fille, Estrella, qui lui en veut, elle a quitté la maison, s’est installée avec un apprenti boulanger et veut abandonner ses études, ce que Ramona ne peut accepter.
Sans pauses
C’est une vraie course contre la montre qui s’engage pour elle. On pense à Juste une nuit d’Ali Asgari ou A plein temps d’Éric Gravel. Elle a du mal à respirer, Ramona. La caméra de Lucia C. Pan ne la lâche pas : en voiture, à pied, de chez elle à l’appartement du vieil homme dont elle s’occupe, son nouvel emploi à mi temps. Un espoir pour elle de pouvoir prendre sa vie en main. Seules pauses dans cette vie où elle s’essouffle, les coups de fil à sa copine, une soirée avec elle. Oublier un temps son quotidien, dansant, buvant jusqu’à plus soif. L’interprétation de Maria Vasquez dans le rôle de cette femme qui se bat jusqu’au bout pour vivre autre chose que ce qui lui est assigné est remarquable. Et comme le disent les paroles de la chanson qui clôt le film « Femme si fatiguée de te battre, que puis je te dire femme ? Si tu es comme notre terre et notre terre est telle que toi ? On sort du film d’Alvaro Gago à bout de souffle !
ANNIE GAVA
Matria, le premier long métrage d’Alvaro Gago, était en compétition au festival Cinehorizontes, Marseille. En salles le 14 février 2024