Musicien et producteur reconnu de musiques électroniques, Yuksek s’est lancé au défi de la photographie. Beirut ma bet mout, proposée par Biennale 2024 d’Aix-en-Provence, est sa première exposition photo. Il s’explique : « C’est la photo qui m’a poussé à sortir de chez moi. Elle m’a aidé à apprivoiser le monde à une époque où l’extérieur me semblait hostile ». Il nous embarque ainsi dans son voyage en nous offrant ces échantillons figés d’extraits de vies. On y rencontre la ville, abimée, et ses habitants, résilients.
Certains contrastes saisissants nous interpellent, nous émeuvent aussi. Comme ce disquaire qui tourne le dos à l’actualité affichée sur la télévision de sa boutique et dont le cliché côtoie celui du port de Beyrouth en feu. Comme cet ange qui surgit derrière de lourdes grilles, ou cette statue qui se dresse fière et choisit d’avancer, laissant derrière elle un tas de gravats… Autant de témoins d’une ville dévastée par les conflits et pourtant animée par une force vitale, qui semble à la fois discrète et inépuisable.
En images et en musique
L’instantanéité de chaque image nous invite à imaginer son contexte, mais aussi une suite, et naturellement nous imaginons un scénario au-delà du cadre. Qu’observe cette femme accoudée à la rambarde, qui s’octroie une pause dans l’ascension de cet escalier ? Où se rend cette passante, dont la courbure contraste avec la droiture de sa canne ? Qu’imaginent ces trois femmes qui contemplent l’horizon, face à la mer ? De quoi discutent ces jeunes gens dont les silhouettes réunies se dessinent devant un coucher de soleil ?
Notre réflexion est accompagnée tout au long de la visite par une musique composée spécialement par l’artiste pour cette exposition. Le nom donné à cette exposition Beirut ma bet mout, fait écho au morceau composé par Yuksek en soutien aux habitants, quelques mois après la double exposition du port de la ville en 2020.
CÉLIANE PERES-PAGÈS
Beirut ma bet mout est présentée à la Chapelle des Andrettes (Aix-en-Provence) jusqu’au 12 octobre.