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AccueilCritiquesBlind Runner : dans l’angle mort de l’humanité

Blind Runner : dans l’angle mort de l’humanité

D’un couple séparé par l’incarcération, Amir Reza Koohestani fait une tragédie contemporaine, métaphore de la société iranienne

Depuis plusieurs années, Amir Reza Koohestani puise dans l’actualité qui secoue l’Iran la matière d’un théâtre profondément politique. En s’inspirant de la mort de Mahsa Amini, tuée pour avoir mal porté son voile, et de la journaliste Niloofar Hamedi, emprisonnée à cause de ses enquêtes sur l’affaire, Blind Runner évoque dans le destin de trois personnages toute la politique actuelle de censure et d’atteintes au droits de l’homme de l’Iran.

Mohammad Reza Hosseinzadeh et Ainaz Azarhoush y incarnent un mari, en liberté, et son épouse, emprisonnée pour motifs politiques. Séparés de corps, ils s’aiment de toute évidence, mais sont contraints de n’échanger que sous écoute, dans le parloir d’une prison ou au téléphone. Amir Reza Koohestani fait de leurs échanges gênés l’endroit d’une écriture d’emblée forcément politique où l’intimité proscrite et l’incarcération dénoncent tout un système dévorateur d’émotions et de vies. La mise en scène le confirme. Elle isole les acteurs dans des carrés de lumière, les fait parler en frontal ou de façon décalée dans l’espace, lorsqu’elle ne les fait pas courir d’un bout à l’autre du plateau, sans jamais se rattraper.

La lumière au bout du tunnel ? 

Car si la parole ne permet pas de tisser un lien de résistance alors, pour lutter, il faut courir. Comme le fait Parissa, marathonienne devenue aveugle depuis un tir de chevrotine de la police, et qui participe en Europe à des courses organisées en soutien aux activistes politiques. Il faut aussi s’aider : comme le fait le mari, qui apprend à courir le marathon aux côtés de Parissa, en tant que guide d’aveugle. Il parvient ainsi à voyager, et s’éloigne de sa femme. La marathonienne sera ainsi le double, libre, de la prisonnière, résignée à l’enfermement et à la solitude, en choisissant in fine de risquer l’exil et sa vie dans un plan radical : franchir les 38 km du tunnel sous la Manche. Deux métaphores de l’espoir iranien pour le changement, qu’une chute inattendue précipite soudain dans la nuit.

ETIENNE LETERRIER

Blind Runner a été donné dans le cadre du festival actoral du 27 au 29 septembre à La Criée, théâtre national de Marseille. 
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