Donné dès la fin du mois de juillet depuis de nombreuses années, le festival des Nuits Pianistiques propose désormais également des temps forts en dehors de sa faste période, accompagné, chose saluable, d’échanges avec le public. Le bord de scène donné après le concert a permis notamment à de jeunes concertistes et possibles recrues d’échanger autour du concert, des œuvres choisies, et de maintes autres questions liées au métier et surtout à l’instrument. Après Mathis Catignol en décembre dernier et une soirée de musique de chambre en mars, c’est finalement le fondateur du festival Michel Bourdoncle qui s’est attelé à l’exercice, avec un programme particulièrement ambitieux, dont il a su faire entendre les différentes facettes avec aisance et générosité. Les morceaux de bravoure techniques s’y enchaînaient : la très casse-gueule Vallée d’Obermann de Franz Liszt, pleine de désespoir et chantante sur la moindre de ses échappées thématiques. L’échevelée version pour piano solo de la Rhapsodie in Blue de Gershwin, dansante et enjouée à souhait. La poésie des Intermezzi opus 118 de Brahms, la mélancolie des Nocturnes de Chopin choisis sur le volet, l’étrangeté et la densité de la Sonate n°7 de Prokofiev … Rien ne fut laissé au hasard, jusqu’au choix d’intentions et d’intensités jumelles sur les pages, plus impressionnistes, et modales, de Debussy, Déodat de Séverac ou encore du Yan quan san die écrit par un compositeur anonyme chinois. De quoi se souvenir que le musicien, programmateur chevronné, pédagogue à l’initiative de nombreuses masterclasses, demeure un concertiste hors pair. Et attendre de pied ferme l’alléchante programmation estivale qui s’annonce !
SUZANNE CANESSA
Concert donné le 5 mai, au Conservatoire Darius Milhaud, Aix-en-Provence