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Enfants sacrifiés de l’exil

Complexe, sans manichéisme, Elegie d’exil de Soly impose un point de vue nouveau, intérieur, vécu, sur les « règlements de compte » marseillais

« Comme vous me voyez-là, je n’ai rien d’un daron comorien, j’ai écrit une fiction que je porte en scène… » répond Soly lorsqu’on lui demande s’il raconte son histoire. Jusqu’ici il avait deux identités, celle de B.Vice, du hip-hop, de la mémoire de son ami assassiné Ibrahim Ali, et celle de M’Baé Tahamida Mohamed, le travailleur social et militant. En écrivant et en jouant Elégie d’exil il noue ces deux fils par la langue, le théâtre, mettant en scène les destins tragiques des Comoriens des quartiers marseillais. « Qui pourraient à quelques détails près être Algériens ou Marocains, enfants de la colonisation française. »

Révolte tragique

Au Théâtre de l’Œuvre la salle hypercomble (sur les marches, debout au fond, dans les travées…) d’un public marseillais majoritairement noir attendait la pièce avec fébrilité. Il est rare de voir quatre Noirs au jeu, à l’écriture, à la mise en scène (Estelle Ntsende, qui joue aussi la fille) Profondément hip-hop par le mélange de musiques live (Salif Diarra) et samplées (Mozarf), par la danse krump, par le rythme slamé des mots et des rimes, Elégie d’exil raconte une histoire simple. Celle d’un Comorien qui peine à vivre à son arrivée à Marseille, réussit pourtant à se marier, à fonder une famille, à élever trois enfants, dont deux meurent. Dans une rixe idiote pour l’aîné, victime d’un règlement de compte, troué de balles et jeté dans un coffre pour le plus jeune. Comment un fils dérive-t-il ? Les ravages du trafic de drogue sont décrits mais aussi le poids des traditions communautaires, les difficultés d’un enfant à accepter l’humiliation constante de ses parents qui enchainent ménages et petits boulots…  Sa révolte, tragique parce qu’elle se retourne contre lui et les siens, semble, dans ce contexte social délétère, inévitable.

AGNÈS FRESCHEL

Elégie d’exil a été créé le 6 décembre au Théâtre de l’Œuvre, Marseille.
À venir 
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16 décembre à 18h
theatre-oeuvre.com
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