mercredi 2 octobre 2024
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Flamenco afrodescendant

Avec The Disappearing Act, la chorégraphe Yinka Esi Graves met en avant les racines africaines profondes du flamenco, laissées par les populations colonisées, et invisibilisées

D’origine ghanéenne et jamaïcaine, née à Londres, l’artiste Yinka Esi Graves a grandi en Angleterre et pris des cours de flamenco en Andalousie. Influencée par son multiculturalisme, la chorégraphe est animée par la volonté de rendre visibles les traces des diverses cultures qui ont construit cette danse andalouse et qu’elle ressent dans son propre corps. Dans ce premier projet personnel, The Disappearing Act, accompagnée par Raúl Cantizano à la guitare, Remi Graves à la batterie et Rosa de Algeciras au chant, il s’agit pour elle d’explorer les racines afrodescendantes profondes du flamenco, né avec la présence d’Africains dans le Sud de l’Espagne avec la colonisation.

Flamenco revisité

Du flamenco traditionnel, Yinka Esi Graves garde le chant et l’accompagnement musical : une chanson flamenca se superpose aux notes à consonnances orientales de la guitare. Si quelques pas et gestes sont reconnaissables, la danse est, elle, déconstruite. La chorégraphe s’immobilise un temps dans certaines positions et décompose ses mouvements au rythme énergique de ses talons martelant le sol qui dialoguent en contre-temps avec la batterie. Ses gestes convoquent aussi bien des influences ghanéennes qu’espagnoles ou jamaïcaines. Sa démarche consiste en un jeu d’apparitions : dessiner à la craie une cartographie de sa danse sur le sol pour rendre visible son parcours, ou danser de dos, soulignant ainsi une absence antérieure qui se comble.

Histoires oubliées

Tout en nous introduisant à Miss Lala, circassienne afrodescendante du XIXe siècle peinte par Degas, qui la fascine et symbolise l’invisibilisation des personnes racisées, Yinka Esi Graves représente son propre écartèlement entre ses diverses cultures et les injonctions sociales qui effacent son identité. Elle se maquille sur scène face caméra pour « redéfinir les contours de son visage », en s’affublant d’une perruque. Mais au-delà d’elle-même, l’enjeu de The Disappearing Act est de rendre leur place aux histoires oubliées des personnes colonisées et des corps noirs, qui se cachent derrière les danses d’aujourd’hui, en dévoilant ce qui résiste malgré les disparitions.

CONSTANCE STREBELLE

The Disappearing Act a été donné du 18 au 21 juillet dans la Cour du lycée Saint-Joseph, Avignon

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