mercredi 2 octobre 2024
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La flamme, les jeux et l’art

Gérald Darmanin avait annoncé l’annulation des festivals d’été pour pouvoir concentrer les drones et les effectifs de la sécurité publique sur les Jeux olympiques. Les opérateurs culturels, résilients, ont négocié, raccourci ou reporté leurs festivals de quelques semaines. Très peu ont annulé, mais à quel prix ? Les spectacles vont se chevaucher en juin, le Festival d’Avignon, fréquenté par de nombreux enseignants, va commencer avant les vacances scolaires. Le In affiche d’ores et déjà des réservations record, mais qu’en sera-t-il du Off, des compagnies fragiles, de l’effervescence ? Comment ceux qui aiment à passer d’Aix en Juin au Festival de Marseille, des photos arlésiennes aux scènes avignonnaises, du jazz de la côte aux classiques du Lubéron, des actuelles du Zik Zak aux mondes des Suds, vont-ils organiser leur été ? 

La culture et le sport sont cousins, voisins, jumeaux, et le spectacle olympique grec comprenait des compétitions de poésie, d’art et d’élocution. Associer l’Art et le Sport était pour Pierre de Coubertin, fondateur des J.O. modernes, d’une évidente nécessité. Mais aujourd’hui ces deux façons complémentaires d’accomplir les possibles du corps et de l’esprit, de l’individu et du groupe, et de se dépasser pour sublimer le monde, ont pris des voies différentes. Il est sans doute temps, pour le monde du sport comme pour celui des arts, de tenter une réconciliation, sans pour autant se réclamer d’un Olympisme grec excluant les femmes et sacrifiant aux Dieux. Et moins encore d’un Coubertin raciste, sexiste et pronazi pour qui Culture et Sport avançaient d’un même pas martial vers l’épure blanche débarrassée des métèques.  

Médias et sens critique
Critiquer l’omniprésence et la domination du spectacle sportif est, pour un journal culturel, un parti pris osé. Ceux qui s’y risquent sont traités d’élitistes incapables de comprendre ce qui fait l’identité d’un peuple. La censure est sans nuance, la discussion impossible. A peine peut-on mettre en doute l’opportunité du mécénat de Coca-Cola®, fabricant d’obésité et champion du monde de la pollution plastique mais sponsor des J.O. depuis 1928. Il n’est pas de bon ton de dire que la Seine aurait pu être dépolluée et la marina de Marseille construite à la simple attention des habitants et des touristes. 

Pourtant, la compétition sportive, bien que plus inclusive, souffre encore de domination masculine validiste. Les Jeux Paralympiques restent peu médiatisés, les épreuves féminines secondaires, les LGBTQI+ largement discriminés dans les clubs et les insultes racistes fréquentes dans les tribunes. Ces nuances de brun sont combattues par des  associations militantes et des collectivités qui mettent la pratique sportive au cœur de  leurs politiques, mais les Olympiades Culturelles feront-elles les Unes de nos journaux autant que les médaillés masculins ? 

Journaliste sportif.ve est devenu un métier, qui s’enseigne dans les écoles supérieures, se recrute dans les télés, les radios et la presse quotidienne et spécialisée. Le spectacle sportif a droit régulièrement aux Unes locales et nationales, alors que les plus grands festivals ne les décrochent que sporadiquement, et que le journalisme culturel ne s’enseigne plus.

Sollicités par les Villes et l’Etat pour animer les J.O. , les artistes ont conçu des spectacles participatifs et travaillé la beauté du geste sportif. Inclusifs, citoyens, ils accompagneront la liesse et la flamme, construisant un contrepoint non compétitif, et parfois ironique et critique. Un moyen, peut-être, de réconcilier arts et sports, par l’ouverture populaire et participative pour les uns, et la tolérance de la critique pour les autres.

AGNES FRESCHEL

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