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AccueilÀ la Une"Le Choix du pianiste", entre les touches

« Le Choix du pianiste », entre les touches

Le Choix du pianiste croise l’histoire française des années 1930 et de la Seconde Guerre mondiale avec celle d’un musicien. Dans une sentimentalité parfois excessive, mais non sans charme

Des mains de pianiste jouent dans le vide. Ce sont celles de François Touraine (Oscar Lesage) qui, même sans clavier, continuent de jouer Chopin, Liszt, Beethoven et Bach. Le Choix du pianiste, écrit et réalisé par Jacques Otmezguine, retrace les étapes du destin de François, les enchevêtrant sans chronologie. L’enfance dans les années 1930 au sein de la bourgeoisie française antisémite, auprès d’un père (Philippe Torreton) hostile à la vocation d’un fils qu’il destine au commerce. La ruine de la famille. Le début de carrière du jeune prodige, à la Salle Gaveau, sous l’aile du chef d’orchestre Paul Paray (André Manoukian). Son histoire d’amour aussi absolue que son oreille pour sa professeure juive, Rachel (Pia Lagrange). Ses déboires pendant la guerre. Sa déchéance dans l’après guerre. Son alcoolisme et sa renaissance dans les bras d’Annette (Zoé Adjani). Une vingtaine d’années de l’histoire française du XXe siècle à l’arrière plan d’un drame romantique mis en lumière par une chaude palette de bruns, de bleus de verts, et incarné par un Chopin en dominantes majeure et mineure. 

La musique, omniprésente, révèle les sentiments, convoque les fantômes, ressuscite les disparus pour un dialogue éternel dans un présent renouvelé. Pour ce faire, le réalisateur s’est adjoint les talents pianistiques de Paul Lecocq et de Polina De Carlo, et a confié la musique originale, au non moins talentueux Dimitri Naïdich. Ainsi, malgré un scénario et des dialogues souvent prévisibles n’évitant pas toujours les poncifs, malgré une sentimentalité qu’on pourrait juger excessive, Le Choix du pianiste nous embarque dans son émouvante partition.

Les femmes font l’Histoire

François n’est pas particulièrement sympathique, invraisemblablement naïf et longtemps coupé de la réalité. Si le titre du film met en valeur son choix, force est de constater qu’il reste globalement passif et ne s’engage guère. S’il peut enfant développer son don pour la musique, c’est grâce à sa mère (Laurence Côte) et à Rachel. S’il accepte de jouer sous la direction de Von Karajan pour Hitler tandis que les musiciens juifs sont chassés des orchestres, mis au placard ou exterminés, c’est en victime d’un chantage et pour, croit-il, sauver Rachel des camps. S’il parvient à sortir de sa dépression après son procès à la libération et obtenir une réhabilitation, c’est grâce à son nouvel amour, Annette. Ce sont les femmes qui choisissent, décident et agissent. Même sa sœur (Marie Torreton) collaboratrice abjecte, active et convaincue, semble plus forte que lui. Jacques Otmezguine dit avoir voulu rendre hommage à la résilience humaine en nous immergeant dans une histoire collective où les individus sont confrontés à des décisions difficiles. Dans les troubles de l’Histoire, si l’art ne saurait être ni un refuge, ni une excuse – « Un cosaque est-il plus mélomane que le nazi ? » demande-t-on à Touraine, il reste pour le réalisateur, salvateur.

ÉLISE PADOVANI

Le Choix du pianiste, de Jacques Otmezguine

en salle le 29 janvier

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