Les nouvelles explorations visuelles et sonores des artistes n’ont plus aucun secret pour les associations Zinc et Seconde nature, associées dans ce projet exponentiel : douze expositions, seize créations, seize performances-concerts-spectacles pour trente lieux partenaires dans trois villes (Marseille, Aix-en-Provence, Avignon). Plus de soixante-dix artistes originaires de douze pays ! Des chiffres à donner le tournis… sauf à Mathieu Vabre, directeur artistique de la Biennale des imaginaires numériques, et ardent défenseur des « artistes arpenteurs de nouveaux mondes ». Ceux du numérique et du digital qui explorent le monde de la nuit qui « permet de se détacher de l’hégémonie de la vision et libère les autres sens. C’est également l’espace de nos rêves et de nos cauchemars, mais aussi des métamorphoses de soi, de la transformation de nos corps, de nos identités et de la manière dont nous allons agir ». Autant de pistes de recherches et de questionnements et autant de formes inédites qui interrogent la transformation de cet espace-temps quasi insondable. Hybridation, métamorphose, expérimentation, innovation singularisent l’ensemble des actes artistiques, telle l’installation de Quayola (lauréat du prix de la Fondation Vasarely et de Chroniques en 2020) qui explore « la tension entre le naturel et le médié, le réel et l’artificiel, le traditionnel et la haute technologie ». Telle encore la Veille infinie de Donatien Aubert qui « incorpore une expérience de réalité virtuelle, un court-métrage en images de synthèse, des animations ainsi que plusieurs sculptures créées par conception et fabrication assistées par ordinateur ».
La lumière blanche
Des thèmes récurrents, comme la « lumière blanche », traversent nombre de propositions aux protocoles rigoureux. Certaines en lien avec l’astronomie : dans Dead stars funeral, Stéfanie Roland transpose le phénomène de la mort d’une étoile en une expérience humaine à portée de tous, par le biais d’une imprimante connectée à la base de données des institutions spatiales. La machine à images de Lucien Biteaux, La perception de l’astronome, plonge le regardeur dans l’infinie dimension stellaire, tout en captant ses minuscules réactions nerveuses… D’autres en lien avec l’environnement : avec pour matériau principal la lumière, Sophie Whettnall explore la relation du corps avec l’espace par l’intermédiaire d’exercices contemplatifs et silencieux. Tandis que la création de Sébastien Robert, The lights which can be heard, restitue le son des aurores boréales afin de nous alerter sur sa disparition. Au croisement de plusieurs disciplines – photographie, sculpture, installation – le film Depth of discharge de Marjolijn Dijkman présente des objets qui incarnent la technologie et l’utilisation de l’énergie comme le lithium, le charbon, les circuits imprimés et les appareils personnels.
La Belgique, invitée d’honneur
Impossible de rendre compte des projets de tous les artistes tant les champs de réflexion et de recherche sont infinis. Mais tous sont des signatures artistiques puissantes qui nous projettent dans une nuit troublante… au bord de l’insomnie.
Après le Québec en 2018 et Taïwan en 2020, la scène artistique belge déploie sa créativité dans le champ des arts numériques en présentant une vingtaine de projets d’artistes des deux communautés. Une manière pour la Belgique d’ouvrir de nouvelles perspectives d’échanges avec la France, mais également entre la Flandre, la Wallonie et Bruxelles.
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
Biennale des imaginaires numériques Jusqu'au 22 janvier 2023 Marseille, Aix-en-Provence, Avignon chroniques.org