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L’une et l’autre

Dans Mi Bestia, la réalisatrice colombienne Camila Beltran entremêle d’une caméra inspirée les rapports hommes-femmes, croyances et superstitions, réel et fantastique

Période charnière de la vie, l’adolescence inspire souvent les cinéastes, fictions ou documentaires. Nombreux aussi les films dans lesquels un humain se transforme en animal, dont le fameux Cat People (La Féline 1942) de Jacques Tourneur et ces derniers mois, on pense, bien sûr, au très réussi Le Règne animal de Thomas Cailley. Avec Mi Bestia, son premier long métrage, la réalisatrice colombienne, Camila Beltran, remarquée pour son travail de vidéaste et pour ses films expérimentaux, associe ces deux thématiques. Rien d’étonnant finalement, l’adolescence n’est-elle pas une transformation !

Bogota, 1996. On fait la connaissance de Mila (Stella Martínez), que la caméra portée ne quitte guère, au milieu d’autres jeunes filles et de religieuses dans son école catholique. La sœur principale fait un discours enflammé sur la venue du diable, la Lunada, l’éclipse de Lune qui s’annonce. Ce n’est pas la seule à avertir du danger. À la télé, les mises en garde, les informations sur des fillettes qui disparaissent s’accumulent… dans un pays catholique où existe une grande peur des figures associées au diable. 

Mila, un peu introvertie, taiseuse, le visage souvent triste, vit avec sa mère, Eva (Marcela Mar) et avec Dora, (Mallely Aleyda Murillo Riva) l’employée de maison chargée de la garder quand la mère rentre tard du travail. C’est avec elle qu’elle échange un peu, sur le garçon qui la regarde à la sortie de l’école et qui lui plait bien, Miguel Ángel (Felipe Ramírez) et sur ses pensées. Quant à Dora, elle lui confie la raison du départ de son village, un viol. 

Les regards de l’ami de sa mère, David (Héctor Sánchez) chargé de la surveiller et lui répétant sans cesse que Bogota est dangereux pour les filles et les femmes mettent Mila mal à l’aise. Pour lui échapper, elle déambule dans les rues, casque sur les oreilles, ou se réfugie  dans la forêt, dense et sombre, une zone dite sauvage qui entoure la ville, interdite aux filles mais qui met à l’abri des regards. Des séquences d’errance où l’on partage les craintes, les interrogations de la petite fille qui devient femme. 

« Sur ces scènes, on est en lumière naturelle à 100 %, sans sources. C’est une sorte de jungle un peu sale, avec une couche de crasse sur les feuilles, presque poussiéreuse à l’image », explique le directeur de la photo, Sylvain Verdet qui précise aussi que la caméra portée, très près du personnage et l’utilisation presque exclusive de focales moyennes ou courtes leur a été inspirée par Répulsion de Polanski. Effectivement la caméra suit au plus près la fillette qui se transforme au fur et à mesure que s’approche la nuit fatidique.

Stella Martínez, dont c’est le premier rôle, interprète avec talent Mila dont elle rend sensible la palette d’émotions qui la submergent. Les choix de mise en scène, séquences au ralenti, contre plongées, gros plans sur les visages, musique, motifs récurrents d’animaux, créent chez le spectateur l’impression d’un monde sombre où tout peut arriver jusqu’à ce que la Lune rouge illumine le ciel.

ANNIE GAVA  

Mi Bestia, de Camila Beltran
En salles le 4 septembre

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