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MUCEM : Bleuets, digitales, chardons, pensées…

Jusqu’au 10 mars, l'oeuvre vibrante de l'artiste René Perrot donne des couleurs au Mucem

Qu’il est intrigant, ce titre de la nouvelle exposition du Mucem ! Mon pauvre cœur est un hibou est une citation issue du Bestiaire de Guillaume Apollinaire. Or René Perrot, l’artiste à l’honneur dans le bel espace Rivière, en haut du fort Saint-Jean, aimait les bêtes et débordait de compassion pour les oiseaux de nuit, à son époque trop souvent cloués sur les portes des granges. Il en a peint, gravé, tissé, et a même ouvert son atelier à la cohabitation avec une chouette chevêche, Grisette.

Un homme attentif

C’est ce qui frappe au sortir de cette exposition monographique : la profonde humanité imprégnant son œuvre protéiforme, son attention prêtée tant aux humains qu’aux animaux et aux plantes. Dans l’entrée, une immense tapisserie : loin de toute ostentation, René Perrot l’a intitulée Dans un fossé de mon village. Y éclate l’heureuse foison de décennies pré-glyphosate, chaque espèce de fleur ou de papillon détaillée dans son puissant élan vital. Très ingénieusement ouverte aux regards sur ses faces avant et arrière, elle dévoile le travail de précision des tapissiers de l’ombre, les artisans de la Manufacture d’Aubusson. Une scénographie rendant hommage à un homme attentif, toute sa vie (1912-1979), aux métiers et usages vernaculaires, notamment dans les campagnes, longtemps parcourues pour le compte de l’ancêtre du Mucem, le Musée des Arts et Traditions populaires.

Alice Bernadac, conservatrice de la Cité internationale de la Tapisserie, a assuré le commissariat avec Marie-Charlotte Calafat et Raphaël Bories, conservateurs du Mucem. Tous trois ne dissimulent pas leur admiration, leur respect pour un artiste traumatisé par deux guerres mondiales, résolument anti-militariste, et qui n’en a pas moins honoré la vie avec tout son talent. Excellent affichiste, ancien élève de Cassandre et Jean Carlu aux Arts décoratifs, il a notamment réalisé un frappant poilu crucifié, qui figure dans le parcours. Prendre le temps, aujourd’hui, de s’y arrêter alors qu’à nouveau les bruits de bottes résonnent de plus en plus à travers le monde, est une expérience forte. On vous recommande, aussi, de ne pas sortir du bâtiment sans avoir découvert les archives audiovisuelles dans la salle de projection : voir et entendre René Perrot réconcilie, un peu, avec l’humanité.

GAËLLE CLOAREC

René Perrot
Mon pauvre cœur est un hibou
Jusqu'au 10 mars
Mucem, Marseille
mucem.org
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