En novembre 2022 est sorti Octave, le dernier tome de la trilogie d’Arnaud Cathrine commencée avec Romance en 2020 et Nouvelles vagues en 2021. On y retrouve Vince et Marilyn, tous deux encore très mal remis de leur relation amoureuse avortée avec Octave, lequel a fui Paris pour aller vivre avec son père. C’est par hasard qu’ils avaient découvert avoir aimé le même garçon et cela les avait rapprochés. « C’est long de revenir à la vie. La vie sans lui. » Les confinements se succèdent, ramenant la douloureuse privation de liberté, les cours de fac en visio, l’impossibilité de se rencontrer et celle d’exercer les petits boulots alimentaires. Les risques aussi de la tentation de la drogue.
Barthes et Eddy de Pretto
Vince vit chez sa mère mais Marilyn est en coloc ; ses ressources sont très limitées. Avec leurs amis, ils échangent des SMS, des posts sur Instagram, retranscrits matériellement dans le livre, accompagnés de photos. Pendant le déconfinement ils se retrouvent aux Buttes-Chaumont et échangent des plans pour se sauver d’Octave. Leurs préoccupations tournent autour de l’amour, de ses blessures, de ses espoirs ; ils parlent de Barthes et des Fragments du discours amoureux, d’Hervé Guibert et Fou de Vincent, d’Anne Dufourmentelle et En cas d’amour (précipitez-vous chez votre libraire : lectures passionnantes) ; ils écoutent les chansons de Troye Sivan et Eddy de Pretto ; il est question des banques alimentaires, des plateformes d’appels pour les étudiants en détresse, des relations avec les parents. Comment fait Arnaud Cathrine pour être si proche des questionnements des jeunes, et si juste ? Devrait-il cela à sa silhouette élancée qui leur ressemble ? Il a incontestablement le don de l’écoute, l’acuité du regard et l’intelligence du cœur. Ses dialogues sont concrets et ciselés, avec souvent un humour infaillible.
Le livre se partage en quatre parties. D’abord, Vince est narrateur, puis c’est Marilyn. La troisième partie est celle d’Octave, revenu à Paris. On le pensait cruel et indifférent, on le trouve rongé par le doute et le regret. Parce que « le souvenir de Vince m’explose à la gueule », dit-il. Enfin il s’avoue que c’est la peur de l’amour qui l’avait fait fuir. On les suit tous les trois et d’autres de leurs amis avec une sorte d’affection. Arnaud Cathrine nous offre avec cette trilogie un récit résolument contemporain, ancré dans un réel qui n’est pas optimiste mais qui est touchant, vivant. Une des dernières répliques de Vince : « On est vivants, alors on vit. »
CHRIS BOURGUE
Octave, Arnaud Cathrine
Robert Laffont - 17,90 €