jeudi 30 octobre 2025
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AccueilCritiquesOpéra d’Avignon : Triomphe de la nuit 

Opéra d’Avignon : Triomphe de la nuit 

Une jeune cheffe vénézuélienne, une commande à un compositeur en résidence, et Schoenberg au programme. L’audace est possible à l’opéra !

Le public applaudit longuement, très longuement à la magnifique Nuit Transfigurée qui conclut le concert. Si le jeune Schoenberg, au crépuscule du XIXe siècle (1899) n’y est pas encore l’inventeur du dodécaphonisme, son expressionnisme fait apparaître des couleurs subtiles, matérielles, la nuit qui tombe comme les notes descendent, les voix des amoureux qui murmurent dans la fraîcheur sombre, la vie nouvelle qui s’annonce, l’enfant, comme une promesse d’avenir. Déchirante, La Nuit transfigurée s’est affranchie des effets d’orchestre pour ne retenir qu’un petit ensemble de cordes dont le romantisme ne peut être qu’intime, fondé sur le rapport entre les notes. 

Du souffle et des vagues 

Juste avant cela, la création mondiale de Fabien Cali, compositeur en résidence à l’Orchestre national Avignon Provence, explore un autre versant de la nuit amoureuse. Celui, solitaire, d’un homme privé de celle qui l’aime. Si Stéphane Guillon, récitant, introduit la pièce avec facétie, Le Monde est vide sans toi est profondément triste, un de ces joyaux noirs qui brille pourtant calmement. L’orchestre, au complet, s’y révèle précis et expressif, dirigé de main de maîtresse par Glass Marcano qui n’oublie aucun départ et fait vibrer les sentiments sonores. À la voix parlée, plaintive, de l’homme, répond le chant mélancolique et pur de la soprano Camille Schnor, avant que les cuivres, les bois, les percussions quittent physiquement l’orchestre dans  une désertion progressive qui laisse en place seulement les cordes nécessaires à La Nuit transfigurée. 

Car Le Monde est vide sans toi est écrit précisément comme une transition musicale et nocturne entre Wagner et Schoenberg. L’orchestre national d’Avignon, composé d’à peine 35 musiciens, sait se faire magnifiquement lyrique pour porter la mort orgasmique d’Isolde devant le corps de Tristan, recueillant le dernier souffle de son aimé avant de disparaître. Le timbre doux et pourtant ample de la soprano passe sans effort par-dessus les fortissimi, accompagne les vagues, ouvre la voie de la nuit absolue de l’amour. Vibrante, pompeuse, magnifique. Wagnérienne !

AGNES FRESCHEL

Le programme Ode à la Nuit a été créé le 24 octobre à l’Opéra d’Avignon

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