En exergue, on peut lire ; « ce film est librement inspiré de la vie d’Oksana Chatchko » . C’est à partir de rencontres, de témoignages, en particulier du documentaire d’Alain Margot, Je suis Femen, que Charlène Favier la réalisatrice de Slalom, a fait le portrait de cette femme, co- fondatrice avec Anna Hutsol et Oleksandra Chevtchenko, du mouvement FEMEN en avril 2008 et qui a mis fin à ses jours le 23 juillet 2023 à l’âge de 31 ans.
Une fête traditionnelle, des feux, des bougies sur des couronnes, des fillettes qui dansent, images floutées, dans des couleurs chaudes ; la fête de Kupala et une petite fille qui murmure « Je veux épouser Dieu ». Juste avant le titre OXANA. C’est son trajet, son combat que va nous retracer la cinéaste, de 2002 à Khmelnytskyï en Ukraine au 23 juillet 2018 19h à Paris. En passant par Kiev,Minsk , Moscou. Allers retours entre son adolescence marquée par les traumatismes familiaux et la pauvreté, sa relation avec la religion orthodoxe, son activité de peintre d’icônes, son désir de liberté, sa prise de conscience et pour finir a solitude, son désarroi, son désespoir.
Un beau portrait
Par petites touches, Charlène Favier construit son Oxana : « Je raconte l’Oxana habitée, l’Oxana christique, l’Oxana mystique, l’Oxana qui est un peu alchimiste. Aussi la créatrice, l’artiste » Se peint ainsi peu à peu le portrait de cette femme avec toutes ses ambigüités. Des plans comme des tableaux : couleurs chaudes des scènes où les trois fondatrices, Oxana et ses amies, Lada (Lada Korovai) et Anna ( Oksana Zhdanova) construisent leur mouvement FEMEN, leurs combats, et préparent leurs actions contre l’oppression. Couleurs sombres des séquences où elles se font arrêter et torturer. Couleurs froides des rues de Paris où Oxana traine sa solitude après avoir été mise de côté par Inna Shevchencko (MarinaKoshkina) .Et le visage d’Oxana , souvent filmé, en gros plan, lumineux, comme incandescent, visage christique. Une icône comme celles qu’elle peint, transforme, détourne et qui vont être exposées à Paris. Un film sous le signe de la peinture : on découvre les toiles d’Oxana puis celles d’ Apolonia Sokol ( Noée Abita , Lyz dans Slalom) qui devient son amie. On voit les « seins qui attirent l’attention » et qui, dénudés, peints de slogans deviennent des objets qui protestent .Le corps même d’Oxana devient tableau tels les artistes du body painting. « You are fake » lance t-elle à la fin…Un message adressé au monde qui ne réagit pas face aux dictateurs qui violent les droits humains mais aussi à tous ceux qui se mettent en avant au détriment du combat
« .Faire ce film, c’était aussi une manière pour moi de rendre justice à Oxana visionnaire, artistiquement mais aussi politiquement. Son engagement et celui des Femen n’a malheureusement jamais été d’autant d’actualité. » précise Charlène Favier. Certain.e.s pourraient lui reprocher de ne pas avoir décrit assez précisément les actions du mouvement femen « l’un des mouvements les plus importants du XXIe siécle » comme indiqué dans le synopsis. D’autres d’avoir fait une icône de celle qui croyait surtout à la lutte collective. Et pourquoi pas ? Oxana est le portrait réussi d’une femme qui s’est battue, superbement interprétée par Albina Korzh, que la musique de Delphine Malaussena accompagner avec élégance et justesse.
Annie Gava
Le film sort en salles le 16 avril