Le narrateur n’a pas de nom mais c’est un « arabe qui sourit ». Syrien réfugié à La Rochelle, il est « nez ». Il fabrique des parfums aux flagrances d’exil et de nostalgie, celles de musc, de rose et de jasmin qui lui rappelle les effluves de Damas, sa ville qu’il a quittée en 2011 pour échapper au régime d’Assad.
Il est d’abord hébergé à Beyrouth par son ami Naji, « deux enfants étrangers dans un pays étranger ». Comme des millions de réfugiés, ils partagent « le même mode de vie, la même cuisine, la même crise économique et les mêmes malheurs » que les Libanais. Les deux jeunes hommes gravitent dans les milieux d’opposition au « raïs ». Puis « celui qui sourit » décided’effectuer le grand saut vers la France « abandonnant » Naji et la Résistance.
À l’aéroport, leurs derniers mots sont pleins de tendresse et d’affection : « Tu ne veux pas venir en France chez les capitalistes ? Alors je viendrai au Liban te revoir comme un colonialiste », déclare celui qui part. « Rappelle-toi que ton esprit gardera pour toujours les catastrophes, les paradoxes et la magie du Proche Orient » prédit celui qui reste.
Enquête de vérité

Dix ans ont passé. Les amis ne se sont pas revus. Un jour, le « Français » reçoit un message de Delia, une Italienne rencontrée lors d’une manifestation anti Assad. Naji est décédé, il s’est suicidé. En finir, quitter la scène, le combat, voilà qui ne ressemble pas à son vieil ami engagé, rebelle, déterminé, croyant en la résistance internationale contre l’impérialisme. Le narrateur triste et troublé repart au Liban sur les traces de Naji, qui avec sa mort le ramène au pays et l’entraîne dans une aventure rocambolesque.
Avec ce nouveau roman, le journaliste, poète et écrivain Omar Youssef Souleimane continue d’explorer la thématique de l’exil. Exil qu’il a lui-même vécu. Journaliste traqué par les services secrets du régime syrien il quitte clandestinement son pays pour la Jordanie puis la France dont il ignore tout. « Je me suis réfugié dans la langue d’Éluard » écrit-t-il. C’est désormais en français qu’il publie des récits imagés et sensibles d’inspiration principalement autobiographique.
ANNE-MARIE THOMAZEAU
L’Arabe qui sourit, de Omar Youssef Souleimane
Flammarion - 20 €
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