Notre installation dans nos nouveaux bureaux a été l’occasion, lundi, de faire le point sur les raisons de cette aventure singulière, associative, reconnue d’intérêt général, née de la volonté de quelques uns il y a 18 ans.
Nous croyons profondément en l’importance de notre tâche.
Etre un journaliste culturel, c’est éclairer, faire passer, susciter l’envie. C’est aussi tendre un miroir aux artistes, aux opérateurs culturels qui ont besoin de retours sur leur travail dans une société qui ne les pose plus en vedette ou en guide.
Gérard Philipe sur les planches faisait la Une de tous les journaux. Aujourd’hui pour qu’un sujet culturel soit en Une il faut qu’il y ait un scandale, un appel à la censure, une contestation.
Les œuvres ne font plus recette.
Pourtant, on n’a jamais eu autant besoin des artistes, des cinéastes, des écrivains, dans leur diversité. L’assaut culturel de la sphère d’extrême droite est puissant, et efficace. L’édition, la presse, les parcs historiques privés, la production cinématographique, l’art contemporain, le patrimoine artistique, sont détenus majoritairement par des milliardaires d’extrême droite ou de droite extrême, qui influencent la pensée et fabriquent l’opinion, concentrent leur mécénat sur les opérations culturelles indolores, et lancent des opérations contre les humoristes qui quittent les ondes publiques. Des sphères qui se préparent, depuis qu’elles ont conquis les médias, à s’emparer du pouvoir politique.
La culture est un combat…
Nous sommes entrés dans une ère nouvelle, qui signe aussi un changement du slogan de Zébuline. Nous restons Culturel, Populaire et Impertinent, mais nous affirmons désormais les motivations de notre existence : la culture est un combat. Du moins la culture indépendante, émergente, dérangeante, polémique, plurielle, décoloniale, queer. Celle que l’on défend à Zibeline, puis Zébuline, depuis 2007.
Ceux qui nous connaissent depuis 18 ans connaissent les raisons qui ont présidé à notre journal et à sa persistance, contre vents et marées. L’élection de Nicolas Sarkozy en 2007 a achevé de convaincre une bande de copains, persuadée que la culture publique est indispensable à la démocratie, qu’il fallait entrer en résistance, et défendre l’art et la pensée contre le bling bling décomplexé.
Depuis la censure exercée sur les télés et les radios publiques, la concentration des industries culturelles, livres, presse, musique enregistrée, cinéma, jeux vidéos et créations numériques, dans les mains de quelques-uns, et le dénigrement systématique d’une culture publique jugée tour à tour élitiste ou woke, confirment jour après jour une reprise en mains culturelle qui n’a cessé de s’amplifier. Depuis, les subventions culturelles sont à la baisse, la décentralisation culturelle est mise en panne, et la culture publique régresse.

…que nous ne lâcherons pas
Aujourd’hui le combat continue, toujours aussi ambigu, de plus en plus difficile à décrypter. Sarkozy dédicace son autobiographie de détenu dans une librairie marseillaise, Bardella fait fortune avec son essai financé par Fayard, c’est à dire par Bolloré. L’extrême droite ne brûle plus les livres, elle les imprime. Et les soutient par une propagande appuyée dans ses réseaux de presse et sur des réseaux sociaux qui brouillent la donne et les esprits.
Dans ce contexte, le combat culturel que nous avons initié est plus pertinent que jamais. Dans une région où le Rassemblement national, c’est certain, va gagner des villes, des collectivités, et siéger dans les exécutifs, nous devons nous tenir les coudes. Travailler la mise en commun, veiller les uns sur les autres et refuser l’esprit de concurrence.
AgnÈs Freschel
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