Le phare Rembrandt – Le mythe d’un peintre au siècle de Fragonard, une exposition intrigante, labelisée d’intérêt national, au Musée des Beaux-Arts de Draguignan
L’idée est originale : exposer à la fois des œuvres de Rembrandt et le regard d’une époque, celui des collectionneurs, amateurs et artistes de la France du XVIIIe siècle, qui 50 ans après sa mort (1669), s’entichent de l’art du maître flamand, la naissance d’une passion qui ne s’éteindra plus.
Une soixantaine d’œuvres dont trois peintures de Rembrandt, dix autres qui lui étaient alors attribuées et une cinquantaine d’œuvres de peintres sous influence rembranesque sont présentées. L’exposition est conçue par Yohan Rimaud, conservateur du Musée des Beaux-Arts de Draguignan, qui n’a pas choisi Rembrandt par hasard : il s’appuie sur la collection municipale, dans laquelle figurent notamment L’Enfant à la bulle de savon et Portrait de jeune homme portant une toque rouge et une chaîne d’or, attribuées pendant plus de deux siècles au maître flamand. La première toile a même été volée à Draguignan par un de ses admirateurs un soir de juillet 1999, qui l’a restituée en 2014.
Donner le la
Dans les trois sections du parcours, un Rembrandt authentique, ou un Rembrandt de l’atelier Rembrandt, ou une œuvre anciennement attribuée au maître, donne le la à une série de peintures accrochées en regard.
Ainsi, dans la première section, « Un caractère de vie et de vérité », une Jeune fille au balai de l’Atelier Rembrandt est entourée par une Coupeuse de chou attribuée à Santerre, une Jeune fille à la fenêtre, attribuée à l’école française, et, un peu plus loin, Une cuisinière à sa fenêtre de Willem Drost. Invitant à comparer les manières de toutes ces figures à mi-corps sur fond neutre, regardant hors du plan de l’image, placées derrière une forme faisant écran – rebord de fenêtre, muret – accentuant l’effet de projection du corps vers le spectateur. Procédés plastiques donnant ce fameux « caractère de vie et de vérité » contribuant à la renommée de Rembrandt.
Dans la seconde section, « Un air de Rembrandt », c’est autour de Un homme en costume oriental de l’Atelier Rembrandt que l’on trouve les « figures de fantaisie » d’Alexis Grimou, surnommé « le Rembrandt français ». Portraits de jeunes femmes ou jeunes hommes reprenant le goût peu académique de Rembrandt pour les accessoires vieux, abîmés, telles des armures, armes, instruments, et les bijoux, turbans et vêtements orientalisants.
Enfin dans la troisième section, « À la fenêtre de l’atelier », c’est autour de La Sainte Famille avec sainte Anne prêtée par le Louvre, que sont accrochées une dizaine de peintures, la plupart de maternité (Fragonard, Oudry, Rigaud) reprenant le procédé de Rembrandt consistant à faire surgir « un coup de lumière », en l’occurrence par une fenêtre placée à gauche, lui permettant de travailler les modulations de ses célèbres clairs-obscurs.
Susciter la curiosité
Mis côte-à-côte, les tableaux permettent dans chaque section de jouer au jeu des ressemblances et des différences des techniques, touches, cadrages, poses, façon d’accrocher la lumière, de creuser des ombres… Une façon simple et accessible de susciter la curiosité alimentée également par les cartels annonçant les attributions, les désattributions, les interrogations toujours en cours, permettant à chacun·e, qu’il soit simple curieux ou amateur informé, adulte ou enfant, seul ou en compagnie, de mettre facilement son regard en mouvement. Et au-delà de Rembrandt, à enrichir son regard sur l’art, sa fabrique, son histoire.
MARC VOIRY
Le phare Rembrandt - Le mythe d’un peintre au siècle de Fragonard
Jusqu’au 15 mars 2026
Musée des Beaux-Arts de Draguignan
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