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AccueilLittératureUn Candide au pays de Brassens 

Un Candide au pays de Brassens 

La Naturalisation relate avec affection et dérision le parcours d’un jeune tunisien exilé, sur les traces de la grande littérature française

Tout comme L’amour des choses invisibles, également publié aux éditions Grasset, le nouveau roman de Zied Bakir est très largement inspiré de la vie de l’auteur, né en Tunisie et résidant désormais à Anduze, dans les Cévennes. 

Ce récit suit le parcours d’Elyas, jeune tunisien francophile rêvant de Paris, de sa littérature et « de ses femmes ». D’abord hébergé chez son oncle, il se retrouve ensuite à la rue, fait un court séjour dans une communauté Emmaüs avant d’être interné dans un hôpital psychiatrique, où il rencontre Adeline, avec qui il vit une brève histoire d’amour. Sorte de Candide moderne, Elyas Z’Beybi, « le solitaire », avance d’échecs en déboires, ne perdant pourtant jamais sa foi naïve dans la langue et la culture françaises. 

Shéhérazade et Quasimodo 

Quelque peu haché dans les premiers chapitres, le roman prend au fil des pages de plus en plus d’ampleur et rend hommage à la curiosité d’esprit et, avant tout, à la puissance du récit. Telle Shéhérazade retardant sa mise à mort grâce aux mille et une histoires qu’elle conte au sultan, Elyas se souvient et invente des récits se déroulant dans son pays natal pour échapper au désir semble-t-il effrayant de sa femme. La découverte de la sexualité constitue de fait une des thématiques importantes de ce roman d’apprentissage et est évoquée elle aussi avec humour et autodérision, comme lorsqu’Elyas s’adresse à son « Quasimodo », sobriquet qu’il donne à son sexe. 

Elyas raconte, écoute, écrit, comme ces « notes pour se débarrasser de soi » (« sur le papier, seulement sur le papier », précise-t-il à sa psychiatre inquiète), qui évoquent sa petite enfance et brossent le portrait de ses parents. La narration intègre des références musicales et littéraires disparates, et use fréquemment de l’ironie, montrant l’admiration d’Elyas pour une certaine culture française parfois considérée comme vieillotte par ses ressortissants. Le récit s’achève avant l’événement qui donne son titre au roman, comme si le processus amenant à la possibilité d’une naturalisation avait plus de valeur que cette dernière. 

GABRIELLE BONNET

La Naturalisation, de Zied Bakir
Grasset – 19,50 €

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