Pour sa 21e édition, CineHorizontes proposait ce dimanche 13 novembre au cinéma Artplex une journée Argentine, avec au programme, deux films sortis en France cette année. D’abord Competencia oficial de Mariano Cohn et Gaston Dupratet, satire décapante et réjouissante du monde du cinéma, servie par une Penelope Cruz en rousse échevelée, un Antonio Banderas en star hollywoodienne, et un Oscar Martinez en comédien de théâtre radical. Puis en soirée, précédé par une prestation de langoureux tango dans le grand hall du cinéma, Karnawal, premier long métrage de fiction de Juan Pablo Felix, connu jusqu’alors pour ses documentaires.
Danse et contrebande
Le film nous transporte dans la province de Jujuy (Nord-Ouest de l’Argentine), près de la frontière bolivienne, et zone de trafics de toutes sortes. Cabra (interprété par Martìn Lopez Lacci, champion de danse à la ville), est un adolescent mutique, ténébreux. Mince et nerveux comme un jeune étalon, visage en lame de couteau, cheveux longs et bruns, resserrés en queue de cheval ou rassemblés en chignon, regard noir et perçant. Sa passion : le malambo. Une danse folklorique des gauchos de la pampa, très physique, virile, pratiquée uniquement par les hommes, au rythme des bombos. Le malambo canalise toute l’énergie et la rage de Cabra. Il délimite son territoire face à une mère un peu lasse, Rosario (Mónica Lairana ), un père absent, voleur incarcéré depuis des années, Raul (Alfredo Castro), et un beau-père gendarme, bienveillant mais maladroit, Eusebio (Diego Cremonesi)). Pour s’offrir les bottes qui lui permettront de participer au grand concours de danse pour lequel il répète avec acharnement, il accepte de passer un paquet en contrebande. Le jeune homme se trouve alors en butte avec les voyous, puis avec la police, pris dans un engrenage.
Le film tourne au road movie, quand il accompagne sur les poussiéreuses routes andines, sa mère ramenant au père, provisoirement libéré, sa vieille voiture qui dormait au garage. Et à la course d’obstacles quand le jeune homme cherche à revenir chez lui pour concourir. Trajectoires rectilignes et méandres de sentiments, pas toujours plausibles. Le karnawal (forme quechua du mot carnaval) qui donne titre au film, avec ses figures effrayantes de diables cornus, ses paillettes, ses fanfares et ses pétards reste en arrière plan, dans l’ambiguïté de la fête exutoire. Chronique d’une famille dé-composée, re-composée , tout à la fois film d’adolescence, d’initiation, thriller de frontières – la violence et la corruption en filigrane, ce premier long-métrage embrasse trop pour bien étreindre. Reste la performance du jeune danseur et la découverte pour beaucoup, du malambo, l’autre danse emblématique de l’Argentine !
ÉLISE PADOVANI
Karnawal de Juan Pablo Felix Projeté dans le cadre de CinéHorizontes qui se tient jusqu’au 24 novembre à Marseille et divers lieux de la région.