Zébuline. Pourquoi avoir créé Les Mixeuses solidaires il y a quatre ans ?
Sin’dee. DJ depuis une vingtaine d’années, productrice de musique depuis cinq ans, j’ai commencé à organiser des soirées dans les bars et les clubs, dont quelques dates avec un collectif mixte à L’Antirouille. En 2019, le 8 mars tombait un vendredi. J’avais très envie de proposer un plateau entièrement féminin à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes. Avec dans l’idée de reverser les cachets des artistes et un pourcentage du bar à une association qui œuvre pour les femmes en difficulté. J’ai monté ce projet avec Miss Airie, également DJ à Montpellier : on avait toutes les deux un bon réseau de copines qui mixaient. On a appelé tout le monde et le jour J, on s’est retrouvées une vingtaine de femmes artistes. La soirée a fait un gros buzz, alors on s’est dit : « pourquoi pas monter un collectif et continuer ? ». C’est ce qu’on a fait.
Qui sont les Mixeuses solidaires ?
Nous sommes aujourd’hui une quinzaine d’artistes, âgées de 32 à 50 ans. Autant dire qu’on a toutes démarré notre carrière il y a un moment. La plupart des membres se trouvent à Montpellier, mais aussi à Béziers, à Nîmes et à Orange. Au niveau de nos univers musicaux, c’est très éclectique : électro, funk, kitsch, hip-hop, radio, EDM… On est une belle équipe, une bande de copines.
À quelles associations sont reversés les fonds collectés ?
On est toutes bénévoles, la plupart du temps on reverse la totalité de nos cachets et un pourcentage sur le bar. On a eu la chance de trouver de chouettes établissements à Montpellier qui jouent le jeu. Depuis notre création, on a notamment reversé des fonds au CHRS, un réseau de centres d’hébergement et de réinsertion sociale pour les femmes en difficulté. Mais aussi à SOS Méditerranée, Les Femmes invisibles, La bulle – douche nomade, ainsi qu’à une association de femmes ukrainiennes… On a aussi joué bénévolement pour les quarante ans du CIDFF [Centre d’information sur les droits des femmes et des familles, ndlr], un organisme qui aide les femmes en difficulté au niveau de l’hébergement comme du soutien juridique. Cette année, on va le faire au profit du Planning familial. Pas question de ne donner qu’à une seule association : on s’est rendues compte que les actions menées par notre collectif permettaient de mettre en lumière la diversité des structures venant en aide aux femmes.
Du 8 au 12 mars, vous organisez la première édition Together Festival. Pourquoi cette envie ?
On essayait d’organiser un événement chaque année, début mars. Et pour récolter plus d’argent, on a décidé de faire un festival sur plusieurs jours et dans plusieurs lieux. Le mercredi 8, c’est à La Panacée, avec une conférence sur les femmes iraniennes. Le jeudi 9, au rooftop de l’Arbre Blanc ; le vendredi 10, au Circus. Le samedi 11, on fait un before au Kwest pour finir en mode club à L’Antirouille. Et le dimanche 12, au Avva Garden, pour clôturer le festival avec une troupe qui propose un spectacle sur le thème de la femme. C’est notre premier festival. On voulait que ça soit un événement hyper accessible et gratuit pour que tout le monde puisse venir. Peut-être que l’année prochaine on aura la chance de faire appel à des têtes d’affiche et que ça devienne un grand événement caritatif. Je serais ravie de pouvoir également diversifier la programmation et faire venir des groupes de musique et combiner le DJing [ensemble des techniques utilisées par un DJ, ndlr] à d’autres domaines artistiques, comme la danse. Pour l’instant, on se débrouille avec les moyens que l’on a. On est passionnées, on aime partager avec le public : pouvoir reverser de l’argent à des association, c’est la cerise sur le gâteau ! On va pouvoir fêter nos quatre ans dignement.
Les Mixeuses solidaires Miss Airie, Sin’dee, Laura Vaï, Mellanie, Nikita, Emilie Dada, Maevol, Miss Dess, Manue G., Emeraldia Ayakashi, Zita Spagiari, Yuki, Miss Emy, La Greta, NJ Deejay.
Vous considérez-vous comme un collectif féministe ?
Je ne sais vraiment pas comment répondre à cette question… Tout dépend ce que l’on met derrière le mot « féministe ». Disons qu’on ne se revendique pas en tant que tel : on est un collectif de femmes qui aidons des femmes en récoltant des fonds grâce à notre passion, le DJing.
Quelle est la place des femmes sur la scène DJ ?
Quand j’ai commencé, c’était vraiment très compliqué d’être une femme DJ. Aujourd’hui, on est encore loin de la parité, il y a toujours très peu de femmes dans les grands festivals. Ça évolue tout doucement… C’est un combat ! Notre collectif est l’occasion de mettre les femmes DJ sur le devant de la scène à travers des plateaux 100% féminin. Malheureusement, c’est la même problématique dans tous les domaines artistiques pour les femmes…
D’autres projets pour le collectif ?
On souhaite ouvrir le collectif à d’autres artistes, des invitées, courant 2023-24. On aimerait aussi soutenir de jeunes musiciennes et leur permettre de se faire la main, se faire connaître, mais aussi d’être soutenues et d’avoir les bons conseils pour avancer. Le métier de DJ, c’est avant tout un réseau, c’est compliqué de se lancer si on ne connaît personne. Là, ça serait plus facile pour elles en nous rejoignant, tout en étant bénévole et en venant en aide aux femmes en difficulté. On aimerait aussi mettre en place des événements dans d’autres villes de France. On essaie d’y consacrer le maximum de notre temps libre, mais une bonne partie des filles du collectif travaillent en parallèle, et celles qui vivent du DJing doivent libérer des dates pour faire du bénévolat sur les événements des Mixeuses solidaires. Ce n’est pas simple. Cet été, on sera à nouveau présentes en tant que collectif au festival Palmarosa (au domaine de Grammont à Montpellier), on en est très contentes. À l’avenir, on aimerait organiser un événement Les Mixeurs solidaires… en intégrant des garçons !
ENTRETIEN RÉALISÉ PAR ALICE ROLLAND
Au programme
8 mars au café de La Panacée (19h-23h)
9 mars au rooftop de L’Arbre Blanc (19h-01h)
10 mars au Circus (19h-01h)
11 mars au Kay West (19h-01h) et à L’Antirouille (00h-06h)
12 mars à l’Avva Garden (18h-01h)
Together Festival
Du 8 au 12 mars
Divers lieux, Montpellier
lesmixeusessolidaires.com