Une success story où la chance sourit à un réfugié afghan dans un Paris globalement bienveillant, ça peut paraître relever du conte à dormir debout. Pourtant – on le précise dès les premières images – l’histoire est tirée de faits réels. Son authenticité sera même certifiée à la fin du film par le glissement du personnage principal à la personne qu’il incarne. Ma France à moi, septième long-métrage de Benoît Cohen, est l’adaptation de son propre livre Mohammad, ma mère et moi paru en 2018 et dans lequel il racontait l’accueil d’un migrant afghan par sa mère. Un projet familial nourri d’une histoire commune, avec une adaptation d’Eléonore Pourriat, compagne du cinéaste, et une musique signée par son fils Aurélio.
Le Mohammad du livre et de la vraie vie devient Reza, interprété par Nawid Elham, un acteur non professionnel, de l’ethnie Hazara comme lui. La mère du réalisateur Marie-France devient France dont les contradictions seront jouées à la perfection par l’impériale Fanny Ardant qui sauve son personnage d’un aspect archétypal, voire caricatural.Son fils Benoît, rebaptisé Joseph, aura les traits de Pierre Deladonchamps. Quant à l’association qui met en contact France et Reza, elle garde son nom qui est aussi son programme : J’accueille.
Deux mondes
Juchée sur ses talons aiguilles, maquillée et manucurée, vêtements stylés, France est une grande bourgeoise formatée par sa classe sociale mais anticonformiste par nature. Elle réside dans un hôtel particulier du XIe arrondissement, près d’un génie de la Bastille qui n’en finit pas de briser ses chaînes. Elle est généreuse et fantasque, tyrannique et altruiste, exaspérante et désarmante, maternelle et brutale. Veuve depuis peu, vivant loin de son fils unique, financier expatrié à New York, elle se sent seule, vide malgré son trop plein d’amour et d’argent.
Reza a échappé à un attentat tout jeune en Afghanistan. Il a quitté sa famille, sa sœur chérie, son père qui voulait en faire un iman. Il a fui un pays qui ne lui offrait aucun avenir, assoiffé de connaissances, avec pour ambition d’intégrer Sciences Po. Le film met en scène cette rencontre improbable, cette cohabitation, les maladresses de chacun, les malentendus, les frictions, les rapports forcément déséquilibrés – quelles que soient les bonnes intentions – entre celui qui donne et celui qui reçoit. Sans doute politiquement trop « lisse », dans l’euphorie d’une histoire exemplaire qui donne victoire à l’impossible, et ignore les méchants, Ma France à moi se veut celle de l’ouverture. Dans le contexte actuel, ce ne peut être qu’un plus.
ÉLISE PADOVANI
Ma France à moi, de Benoît Cohen
En salles depuis le 20 décembre
Campagne d’impact avec l’association « J’accueille »
Mobilisation sur jaccueille.fr