mercredi 2 octobre 2024
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actoral : bel et bien contemporain

Contraint cet hiver de quitter son domicile de Montévidéo qu’il occupait depuis 24 ans, le festival actoral présente une nouvelle édition conforme à son histoire. Jusqu’au 12 octobre à Marseille, le rendez-vous mêle les écritures contemporaines entre danse, théâtre, lecture, performance… Entretien avec son directeur Hubert Colas

Zébuline. Déménagement, réduction des effectifs, vous avez traversé de nombreuses péripéties cette dernière année. Est-ce un exploit d’avoir pu monter cette nouvelle édition ?

Hubert Colas. Je ne parlerais pas d’exploit mais de sauts d’obstacles. Malgré toute l’adversité que Montévidéo a pu rencontrer depuis trois ans, on ouvre cette nouvelle édition avec beaucoup d’optimisme, et avec le soutien de nombreuses structures culturelles marseillaises. On a rencontré dans l’année beaucoup de projets artistiques et d’artistes qui nous ont enchantés, et nous sommes contents de l’édition que l’on a préparée. On est aussi dans l’énergie de 2025, qui sera la 25e édition : un anniversaire qui nous porte vers le futur.

En 24 ans, vous avez vu passer de nombreux artistes. Qu’est-ce qui a changé, dans les formes comme dans le discours, dans les propositions artistiques pendant toutes ces années ? 

On voit bien aujourd’hui que les artistes se posent beaucoup moins la question de savoir s’ils font de la danse, de la performance, de la marionnette ou du théâtre… toutes ces formes sont beaucoup plus poreuses qu’avant, et c’est plutôt joyeux. Il y a dans le champ contemporain une soif de liberté, d’humanité, de reconnaissance des altérités. C’est une façon d’aborder le spectacle différemment, sans faire des discours politiques, mais avec un soin apporté à l’autre beaucoup plus prégnant qu’avant. Les mouvements de la société – comme la reconnaissance de la place des femmes, des étrangers, du genre – sont de plus en plus présents dans les formes que nous pouvons rencontrer aujourd’hui. 

Rébecca Chaillon en ouverture
Cette semaine à La Criée, le festival actoral accueille l’autrice, metteuse en scène et comédienne Rébecca Chaillon. Artiste reconnue – porte-voix des combats afro-féministe et contre la grossophobie –, elle présente deux de ses spectacles pour la première fois à Marseille. D’abord Whitewhashing les 25 et 26 septembre (en compagnie de son acolyte Aurore Déon), où elle s’intéresse à la division raciale et sexuelle au travail, et au racisme intériorisé qui pousse certaines femmes à se blanchir la peau. Et Plutôt vomir que faillir (27 et 28 septembre), où elle dessine à la truelle la révolution des corps et des codes que connaissent les adolescents. Surtout quand ceux-ci sont en dehors des « clous » : gros, homosexuels, noirs, déracinés. N.S.

Est-ce que l’on programme aujourd’hui comme on le faisait il y a 25 ans ? 

On a évolué parce que les artistes ont évolué. actoral ne se donne pas de thématique, pas de règles, et dans ce cadre-là, on est plus à même d’écouter les nouvelles générations, leurs sensibilités, et avoir des coups de cœurs. 

Le festival actoral est un temps fort culturel reconnu en France. Est-ce important pour vous que cette lumière rejaillisse sur les artistes locaux ?  

Il s’avère qu’à Marseille, depuis 2013, beaucoup d’artistes « forts » sont arrivés, des Marseillais sont revenus, et c’est important qu’ils soient présents, comme on le fait chaque année. C’est le reflet artistique d’une ville qui montre qu’elle a une vraie puissance, même si elle n’est pas toujours entendue du côté des institutions – peut-être par méconnaissance.

Parmi ces jeunes artistes il y a Laura Vazquez, dont vous présentez une mise en lecture de son texte Zero le 4 octobre à La Criée. Comment s’est passée la rencontre avec elle ? 

Laura Vazquez est une artiste que je connais depuis longtemps. Ses premiers écrits nous ont enthousiasmés, on l’a déjà invitée à Montévidéo, et à actoral. Elle est écrivaine, poétesse aussi, et s’intéresse à une vraie diversité des écritures. Aujourd’hui elle écrit sa première pièce de théâtre, et avec les acteurs de ma compagnie on a décidé de la mettre en lecture.

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR NICOLAS SANTUCCI 


Hubert Colas présente quatre artistes à découvrir 

· Ligia Lewis : « Artiste berlinoise, chorégraphe, elle vient présenter deux spectacles. Son travail n’est pas encore très connu, ni à Marseille, ni en France mais elle est très prisée à l’étranger. Elle travaille sur la problématique du corps noir et dénonce les sociétés européennes et blanches qui, sans être racistes, créent un clivage entre les différentes communautés. »
Sorrow Swag et Minor matter
1er et 2 octobre
Friche La Belle de Mai

· Némo Camus : « Jeune artiste qui vient de la performance et du documentaire, il présente une “auto-fiction” liée à sa grand mère, jeune actrice-danseuse dans le film Orfeu Negro de Marcel Camus en 1959. Il retourne vers ses origines étrangères à travers les déclarations de sa grand-mère qui parle de la danse, et de comment son corps a été rejeté. Sur scène, un jeune danseur retraverse cette histoire. Un spectacle tendre, magnifique, touchant. »
Dona Lourdès
1er octobre
Friche La Belle de Mai

· Soa Ratsifandrihana : « Elle vient avec un nouveau spectacle qui travaille sur le post colonialisme, et des figures classiques de la danse. Elle met en lumière les danses héritées de ses origines malgaches. Une mixité des formes qui dénonce l’enfermement des corps assujettis par les blancs vis-à-vis des corps noirs. » 
Fampitaha, Fampita, Fampitàna
3 et 4 octobre
Ballet national de Marseille

· Harald Behari: « Le spectacle qu’il présente a reçu le prix Hedda pour la “meilleure production de danse” chez lui en Norvège : un solo d’une force physique assez désopilante et très proche des spectateurs. »
Batty Bwoy
8 et 9 octobre
Friche La Belle de Mai
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