Au Festival d’Avignon, la règle veut qu’à la fin de son mandat, chaque Président·e fasse don de ses archives à la Maison Jean Vilar. Les sept président·es qui se sont succédé à la tête du Festival ont ainsi créé au fil des années un fond d’archives important et précieux. Ce sont ces archives, témoins physiques de l’histoire du Festival, qui sont au cœur de la nouvelle exposition de la Maison Jean Vilar, Les Clés du Festival.
Pour la première fois, il s’agit d’une exposition permanente, qui restera ouverte à l’année, ce qui représente un élargissement de la mission de transmission et de mémoire de la Maison Jean Vilar. L’objectif affiché est de permettre à tous les publics, y compris les moins connaisseurs, de découvrir l’histoire et la spécificité du Festival d’Avignon. Antoine de Baecque, commissaire de l’exposition, a brillamment relevé ce défi en concevant un parcours thématique, à la fois pédagogique et complet.
Parcours thématique
L’exposition est séparée en quatre espaces, chacun dédié à une spécificité du Festival d’Avignon. À commencer par l’aspect technique : le premier espace, intitulé « La Fabrique du Festival » dévoile à travers des photos et des documents professionnels, le processus de transformation annuelle de lieux non-dédiés – la Cour d’honneur en tête – en espaces de théâtre.
Au fur et à mesure du parcours, on découvre l’expansion du Festival dans la ville, comment Jean Vilar (à qui les deux dernières salles sont consacrées) l’a façonné et fait évoluer, grâce à des archives on ne peut plus variées : vidéos, photos, correspondances, carnets, feuilles de salles, maquettes de décors, costumes… entre autres.
La salle consacrée au Festival comme lieu de création est particulièrement impressionnante : des photos et vidéos de chaque spectacle créé à Avignon depuis 1948 et La Tragédie de Richard II par Jean Vilar y sont projetées sur un écran de tulle, derrière lequel sont exposés des éléments de décor et des costumes. Derrière les gradins sur lesquels on peut s’installer pour regarder cette rétrospective, un espace est consacré à Saïgon, spectacle créé en 2017 par Caroline Guiela Nguyen… pour le moment. Chaque année, ce recoin de l’exposition sera remanié pour mettre en avant un spectacle différent, créé au Festival.
Une démarche au premier degré
Soucieux de capter au mieux l’essence du Festival et d’immerger les visiteur·ices dans son ambiance, Antoine de Baecque a fait le choix d’une scénographie très littérale, confiée à Claudine Bertomeu. Ainsi, devant l’entrée de l’exposition se trouve un écran sur lequel défilent des images du public entrant dans la Cour d’honneur à différentes époques. Aux murs de l’espace consacré au Festival Off, de nombreuses affiches de spectacles superposées comme elles le sont dans les rues, et un quiz. Dans les dernières salles consacrées à Vilar, des haut-parleurs diffusent des enregistrements de certains de ses spectacles…
Chaque détail de cette scénographie a son importance, jusqu’au petits haut-parleurs qui permettent d’écouter individuellement les vidéos, qui faisait initialement partie du premier dispositif de sonorisation de la Cour dans les années 1970. De fait, le premier degré assumé de l’exposition n’a rien de simpliste, au contraire, il rend compte d’une connaissance fine de l’histoire du Festival, d’un amour pétri d’admiration pour celui-ci… et d’une volonté de mise en partage, conforme aux ambitions premières de Vilar.
CHLOÉ MACAIRE
Les Clés du Festival a été inaugurée le 5 juillet à la Maison Jean Vilar, Avignon
Retrouvez nos articles Arts Visuels ici