On a retrouvé avec grand plaisir l’excellent et charmant Miguel Bonnefoy venu nous parler de l’amour du soleil. Non qu’il se soit converti à une lointaine religion précolombienne, mais parce qu’il a découvert au détour d’un documentaire, l’existence d’un savant français oublié, à l’origine de la première machine à récupérer l’énergie solaire. Augustin Mouchot était un être maladif et discret. Il a cependant participé à l’Exposition Universelle de 1878 où il a exposé une machine qui fabriquait un glaçon avec l’aide du soleil. L’enthousiasme communicatif de Bonnefoy et la richesse imagée de sa langue en font un des écrivains incontournables des Salons. Il fait d’ailleurs partie de la deuxième sélection du Prix Femina. Il était en dialogue avec Xavier Mauméjean, qui a imaginé l’aventure épique d’un jeune anglais parti en 1936 en Espagne, en pleine guerre civile. Le grand-père de l’auteur s’était engagé dans la Phalange ; il a voulu comprendre les deux partis et construire une structure romanesque à partir de témoignages. Autre dialogue de Bonnefoy avec l’autrice d’un premier roman, Mona Messine, dans lequel elle a voulu offrir un destin de personnage à des animaux, notamment une biche – qui donne son titre au roman – car elle perçoit des similitudes entre l’humain et l’animal. Parallèlement Mona Messine a créé une maison d’édition engagée dans la publication de premiers romans de femmes.
René Fregni n’a pas été oublié. Marseillais, il est chez lui à Manosque et parle des lectures que lui faisait sa mère, de l’aventure des émotions et de l’amour des mots. Mais aussi des engagements politiques de sa jeunesse. Notons aussi la présence de Dominique Ané, connu comme auteur-interprète sous le nom de Dominique A. et compagnon des Correspondances depuis longtemps, qui propose ici un premier recueil de poèmes. Il déclare que ceux-ci sont plus personnels, plus autobiographiques que ses chansons.
Enfin c’est au Paraïs, demeure de Jean Giono, qu’a été rendu le très émouvant hommage d’Emmanuelle Lambert au président des Amis de Giono, Jacques Mény, récemment décédé. Elle évoque leur première entrevue organisée par Jean-François Chougnet, directeur du Mucem de Marseille, qui a initié le travail de plusieurs années sur l’organisation de la grande exposition Giono de 2020. Elle revoit la grosse sacoche qui ne quittait jamais Jacques, pleine de documents essentiels. Elle rappelle son enthousiasme presqu’enfantin et choisit de lire des extraits de quelques œuvres gioniennes pour illustrer sa passion de vivre et de servir l’auteur auquel il a consacré sa vie. Dans cette confidence pas du tout universitaire, mais affectueuse et émue, elle a donné un éclairage personnel sur une « aventure de travail et d’amitié ».
CHRIS BOURGUE
Les Correspondances se sont tenues du 21 au 25 septembre, à Manosque.
L’inventeur de Miguel Bonnefoy (Rivages) El Gordo de Xavier Mauméjean (Alma) Biche de Mona Messine (Livres Agités) Minuit dans la ville des songes de René Fregni (Gallimard) Le présent impossible de Dominique Ané (L’iconoclaste)